L'arme chimique, un arsenal d'un autre temps ? Pas vraiment. L'utilisation de gaz sarin contre la population syrienne en août 2013 dans la banlieue de Damas est venue rappeler à la communauté internationale l'urgence d'éradiquer cet ennemi invisible. Les images des victimes, notamment des enfants, ont ému le monde entier et ont forcé la Syrie de Bachar al-Assad à adhérer à la Convention sur l'interdiction des armes chimiques. C'est le point de départ d'un documentaire de Fabienne Lips-Dumas diffusé sur Arte ce soir et qui fait le point sur l'utilisation des armes chimiques depuis la Première Guerre mondiale. A l'époque, pour la première fois, la révolution industrielle rencontrait la machine de guerre.
Ironie de l’histoire, nous explique le documentaire, ce sont plutôt des considérations économiques qui ont amené les grandes puissances à s’interroger sur l’utilisation d’un tel armement. Parce que les armes conventionnelles sont finalement plus «efficaces» et que les armes chimiques nécessitent des coûts très importants de stockage et de maintenance.
Ce type d’armement fait donc l’objet d’un traité de désarmement. Traité qui est évidemment loin de faire le tour de la question. Selon l’OIAC (Organisation pour l’interdiction des armes chimiques) chargée de ce travail, 82% des armes chimiques déclarées ont été détruites, et le reste le sera dans les années à venir. Mais cela ne concerne que les armes déclarées par les pays ayant signé le traité. Cela ne prend en compte ni les pays non-signataires, ni tout ce qui existe et qui échappe au contrôle de l’OIAC (par exemple, ce que les pays signataires n’ont pas forcément déclaré). En 1995, l’attaque au sarin dans le métro de Tokyo, au Japon, a montré que les terroristes pouvaient y avoir accès. Se pose aussi la question du double usage : par exemple, tel produit dont on se sert pour faire des pesticides et qui peut être détourné pour en faire des armes mortelles. Les agents incapacitants utilisés par la police contre des manifestants ou des preneurs d’otage sont également susceptibles de tuer. Et avec la recherche en biologie, de nouveaux usages peuvent aussi voir le jour.
Au cours de son enquête, Fabienne Lips-Dumas a retrouvé des Syriens rescapés de l'attaque d'août 2013 et aujourd'hui réfugiés en Jordanie. «Le monde entier nous regardait mourir, racontent-ils. On peut échapper aux obus, aux balles, à tout le reste… Mais pas à ça.»
Le souffle de la guerre chimique (Arte, mardi 28 janvier à 20h50)