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Libération
Spoilers

«Game of Thrones» saison 5 épisode 8 : le retour des morts-vivants

Game of Thronesdossier
Attention, cet article dévoile des éléments clés de l’intrigue. La lecture est à vos risques et périls.
Le retour de Ragnar Lothbrok chez lui après avoir ravagé l'Angleterre (dédicace à la série Vikings). (Games of Thrones, HBO/OCS)
publié le 2 juin 2015 à 8h07

Parfois, pendant un épisode de Game of Thrones, ce n'est pas que l'on s'ennuie, mais on baguenaude un peu. On picore comme à un pique-nique entre amis ou lors de la lecture d'une anthologie de poèmes érotiques, mais, à la fin, rien ne nous a vraiment marqué. Là, cette fois-ci, l'ambiance est bien différente. Une longue scène finale vient écraser toutes les autres (évidemment, on se la garde pour les dernières lignes de ce papier). Winter is coming, baby.

L'action reprend à Meereen. Daenerys, sur son trône de pierre auditionne Tyrion et Jorah Mormont, qui, souvenez-vous, ont joué aux gladiateurs devant elle lors de l'épisode précédent. «Pourquoi ne devrais-je pas vous tuer», demande la reine? Le nain ne la joue pas comme Beckham mais comme l'ancien président du Libéria Charles Taylor: «J'ai tué ma mère, j'ai tué mon père, votez pour moi». Il lui propose de devenir son conseiller, rappelant qu'il fut une excellente Main du Roi lorsque que cela n'allait pas encore trop mal à Port-Réal. Tel Marco Polo après un long voyage arrivant face à Kubilai Kahn, il est prêt prêt à l'emberlificoter avec les nouvelles de l'autre du monde. Cela tombe bien, Daenerys est tout ouïe. L'empereur mongol hésitait entre revenir aux traditions du peuple des steppes ou siniser son empire pour le consolider. Daenerys semble altermoyer entre Westeros et Essos. Tyrion essaye de lui faire comprendre qu'une armée et des dragons ne suffiront peut-être pas. Il faudra s'appuyer sur les grandes familles, les rayons qui font tourner la «roue» de la politique. «Beaucoup d'entre vous ont déjà tenté d'arrêter la roue», lui dit le Lannister. «Je ne veux pas arrêter la roue, je veux la détruire», répond Daenerys en bonne robespierienne. Le nain est finalement engagé, à une condition: baisser de rythme sur la bouteille. Pas de chance à l'inverse pour Jorah Mormont, qui, sur les conseils de Tyrion, n'est pas exécuté mais exilé. Pour ne pas trop s'éloigner de sa reine aimée, il décide de redevenir gladiateur. C'est épique, c'est chou, c'est à peu près aussi idiot qu'un garçon transi par la pluie n'osant pas embrasser une fille dans le parc fermé des Buttes-Chaumont, mais, de toute façon, il a la lèpre, alors, à la fin, il va mourir. Tout cela n'a pas grande importance, winter is coming, baby.

A Port-Réal, les conditions de détention de Cerseï ne sont pas au top du hip-hop et l'observatoire international des prisons aurait sans doute beaucoup à dire. Une sœur pas du tout sourire, beaucoup moins amusante que sœur Marie-Thérèse, vient vaguement de temps en temps lui donner à boire. Elle veut là forcer à se confesser, encore et encore. La reine-mère résiste plutôt bien mais on sent qu'elle risque de craquer. A se faire trop d'ennemis, même son oncle Kevan, revenu à la capitale, ne souhaite pas intervenir. Et ne parlons pas de Tommen, complètement tétanisé. Il s'est mué en hikikomori, ces adolescents japonais enfermés dans leur chambre, coupés du monde (ou alors il vient de télécharger The Witcher 3 et il n'en a rien à faire de sa reum). Tout cela n'a pas grande importance, winter is coming, baby.

«Dans le port d'Amsterdam/Y'a des marins qui mangent/Sur des nappes trop blanches/ Des poissons ruisselants/Ils vous montrent des dents/À croquer la fortune/À décroisser la lune/À bouffer des haubans/Et ça sent la morue». Dans le port de Braavos, c'est à peu près la même chose, sauf qu'il y a Arya en plus. Elle continue sa formation pour le dieu Multiface, devient une vendeuse ambulante d'huîtres et de palourdes. Ce beau gosse de Jaqen H'ghar lui demande d'empoisonner un infâme personnage, un parieur (un assureur en fait) qui s'enrichit sur les naufrages, ou non, des autres. Y arrivera-t-elle? Tout cela n'a pas grande importance, winter is coming, baby.

Chez ces cinglés de Bolton, on se prépare à la guerre. Ramsay, qui a depuis longtemps succombé à l'hubris, refuse l'idée de rester bien caché derrière les murs et demande vingt hommes pour aller faire un petit carnage, par surprise, chez Stannis, un peu comme les Gaulois fondant sur Rome. Y-aura-t-il des oies pour réveiller le roi Baratheon? En attendant cette nuit des longs couteaux, Sansa, à force de pression psychologique sur Theon, apprend que ses frères Rickon et Bran Stark ne sont pas morts. A l'image de la princesse Leia prisonnière de Dark Vador, c'est un nouvel espoir pour elle. Tout cela n'a pas grande importance, winter is coming, baby.

Jusque-là, on est dans le tout-venant de l'actu, pas de quoi vraiment faire la une de Libé1. Tout commence au bout d'une demi-heure d'épisode, en douceur. A l'instar des plus belles tragédies bibliques, une petite réflexion pseudo philosophique précède la bataille. Un jeune garde de nuit demande à Sam Tarly pourquoi il faut pardonner aux sauvageons alors qu'ils ont tué ses parents. La réponse du petit-copain de Vère ressemble à une discussion entre Nains, Elfes et Humains dans le Seigneur des Anneaux (ou entre l'armée syrienne libre et le front al-Nosra). «Ok, on se déteste, mais en face, c'est le Mordor (Daech) et ils sont hyper flippants».

Jon Snow, parti à la rencontre des sauvageons réfugiés dans leur village de pêcheurs, applique directement ces réflexions. Par sa posture et sa présence à l'avant de la barque, il est Napoléon revenant de l'île d'Elbe, ou plutôt, George Washington traversant le Delaware. Ce Rubicon de l'amitié, certains sauvageons sont réticents à le franchir. Ils n'ont pas confiance dans le «Roi Corbac» même s'il ne se débrouille pas trop mal et est bien aidé par ce roux de Tormund. Problème, si l'empereur des Français a le droit à cent de jours de grâce avant Waterloo, cela ne dure même pas cent minutes pour le Lord Commandant de la Garde de nuit.

Des entrailles de la montagne surgit une tempête percée d'éclair et un cri à la Edvard Munch, immense, infini, suraigu. Les tympans se percent, la peur s'empare du campement et la plus belle bataille de l'histoire de la série débute. Dans une ambiance mélant le froid du Jour d'après, World War Z et le Retour des morts-vivants, des squelettes surexcités surgissent et tentent de dévorer tout le monde. Les sauvageons jettent un dernier regard sur leurs femmes, leurs fils, et leurs domaines, c'est l'heure maintenant de défendre leur terre contre une armée d'infâmes prête à croiser le fer. Comme ces jours de peine où l'homme se traîne à la limite du règne du mal et de la haine, faut-il continuer ce combat déjà perdu? Mais telle est la fierté de toute la tribu, la lutte continue sous la neige tombante, de férocité extrême en plus d'acharnement.

En haut de la montagne, des marcheurs blancs surgissent sur de fidèles destriers. Ils ont à peu près la même tactique que les orques dans Warhammer qui balancent des hordes de snotlings devant pour submerger l'ennemi avant de venir finir le travail. Les survivants et Jon Snow, bien qu'il tue un Marcheur blanc avec son épé en acier valyrien, sont obligés de fuir comme ils le peuvent. Une sympathique sauvageonne (Birgitte Hjort Sørensen, la journaliste blonde de Borgen), que l'on voyait bien succéder à Ygritte dans le coeur du corbeau, succombe, dévorée par des enfants zombies. Enfin, seulement pour un temps. En position christique, levant légèrement les mains, «venez à moi mes frères», au bord de la berge, le Roi de la Nuit et des Neiges, le chef de l'armée des morts, les ressuscite. Il est très inquiétant, ce n'est pas le genre à chanter «libérée, délivrée» en jouant avec des flocons. Sur sa barque qui s'éloigne lentement, Jon Snow constate le désastre. Une nouvelle armée se dresse face à lui. Barbare, sans âme, elle menace de détruire le monde libre. On a hâte. Winter is coming, baby, baby, baby, I'm all gone

Les tops:

Les Marcheurs blancs qui feraient presque passer les Nazgûl pour de sympathiques cavaliers du dimanche.

Tyrion viré de Port-Réal retrouve tout de suite un taf comme spin doctor chez le parti adverse. Planqué!

Arya, les félicitations probables à la fin du trimestre, les meilleurs huîtres de Braavos.

Les flops:

Cersei, fière mais en mauvaise posture.

Les sauvageons, décimés.

Ils sont bien partis pour gagner le jeu des trônes

Daenerys, désormais bien conseillée, et Jon Snow, à force de sauver le monde et parce que les scénaristes le comparent au premier président américain (oui, on sait, nous aussi on a lu le livre, mais la série n'en fait qu'à sa tête).

Ils sont bien partis pour détruire le monde

Les Marcheurs blancs, mieux qu'Ariel pour laver la planète de toutes ses impuretés.

PS: à noter le caméo chez les sauvageons des membres de Mastodon, un groupe d'Atlanta de sludge metal. Comme ils s'étaient déjà amusés à faire une mixtape sur Game of Thrones, terminons en musique.

1. On a une nouvelle formule, elle est chouette.