Il existe une forêt primaire des programmes de France Télévisions, où paissent des animaux sacrés. En tête de troupeau, le mastodonte patriarche, Des chiffres et des lettres, cinquante saisons. Mais un autre animal, plus discret, broute aussi depuis vingt-cinq ans : Motus, présenté par le très français (à la fois sympathique et méchant) Thierry Beccaro. A la différence de son aînée, qui a conservé assez de folie acidulée pour faire évoluer ses règles comme une déglingo (ajouts de «duels», de «sprints»…), Motus jouit d'une constance millimétrée. Par sa forme même, Motus symbolise la continuité du service public audiovisuel. Du jeu, nous retiendrons bien sûr son «Mo-mo-motus» d'ouverture. Mais aussi son esthétique 8-bits, ses carrés de pixels, ses bleeps lancinants, son «oh ! oh ! oh ! oh !» à chaque tirage de boule noire, métaphore tragique de la tuile qui frappe à tout moment et aura éliminé depuis sa création des milliers de candidats, sept présidents de France Télé, quatre présidents de la République, et vingt-huit albums de Johnny (trente-quatre si l'on compte les lives inédits).
Oh-oh-oh-oh
Mo-Mo-Motus
Capture d'écran du fameux moment du repêchage de boules (oh-oh-oh-oh) (Photo DR)
par Henry Michel
publié le 10 juin 2015 à 19h36
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