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Facebook et la mort... ça jette un froid

La publication de notre article a suscité des réactions contrastées. Ce sujet met mal à l'aise, surtout en été.
En France, le consentement parental est obligatoire pour recueillir les données dites «sensibles» et les photos de mineurs. Une obligation pas toujours respectée. (Photo Jonathan Nackstrand. AFP)
publié le 19 août 2015 à 17h34

La publication par Libération de Facebook, profils d'outre-tombe aura au moins eu le mérite d'en faire réfléchir quelques-uns pendant l'été sur la question de la survie de notre présence numérique après la mort. Pour une partie des lecteurs, été doit forcément rimer avec légèreté (ça rime vraiment, vous avez remarqué ?), et la lecture d'un article sur la mort en cette période n'a pas été forcément appréciée.

Des réflexions qui ont soulevé des questions existentielles : l’été est-il heureux ? Et donc l’hiver est-il triste ? Que sont alors le printemps et l’automne ? Doit-on demander aux Français de patienter jusqu’au 21 septembre pour mourir ? Doit-on attendre l’hiver pour programmer sa dépression ? Les croque-morts sont-ils, du coup, les seuls à déprimer l’été ? Que serait une vie sans été ? Les journalistes qui vivent dans des pays sans hiver ne parlent-ils que de camping, canoë-kayak et pâté en croûte ?

D’autres lecteurs, en revanche, ont pris conscience de la nécessité de gérer de son vivant ce qu’il adviendra de notre identité numérique après notre mort. Nous vous invitions en fin de texte à partager votre testament numérique sur Twitter. Si vous avez été peu à le faire, une majorité a exprimé le souhait que leurs comptes soient supprimés des réseaux en cas de décès (36 tweets comptabilisés). Seize personnes ont en revanche déclaré vouloir voir leurs profils transformés en mémorial, et seuls trois internautes souhaitent le garder en tant que tel.

Cet échantillon met encore davantage en lumière l’urgence de la simplification des démarches quant à la gestion de l’identité numérique post-mortem. Pour les personnes voulant voir leurs comptes supprimés, combien de proches seront réellement en capacité d’effectuer toutes les démarches nécessaires ?

A la suite de sa publication, Axelle Lemaire, secrétaire d’Etat chargée du Numérique, a relayé notre article sur Twitter, indiquant que le sujet serait abordé dans son projet de loi.

Joint par Libération, son cabinet précise qu'il est pour l'instant impossible d'en donner la rédaction exacte, mais livre tout de même quelques éléments : «Le projet de loi vise ainsi d'une part à simplifier l'expression des volontés des défunts, et d'autre part à faciliter l'action des ayants droit pour les faire respecter. Actuellement, certains droits comme le droit au respect à la vie privée ou le droit à l'image s'éteignent avec le décès de la personne. Le projet de loi propose de résoudre ces difficultés en donnant la possibilité aux individus de formuler des directives concernant le devenir post-mortem de leurs données personnelles.» La transmission des données personnelles par un prestataire à ce légataire pourrait être également simplifiée. L'ensemble du texte sera soumis à consultation publique mi-septembre.

Pour faciliter les démarches, la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) propose une revue de liens qui peuvent aider les proches à faire les démarches nécessaires en cas de décès. Facebook, Instagram, Google, Twitter mais aussi LinkedIn, Microsoft Outlook et Yahoo donnent tous accès à un formulaire qui permet aux proches de s'assurer la gestion des comptes des défunts.

Si le gouvernement a tardé à se saisir de la question de l'identité numérique post-mortem, des start-up, elles, sont lancées régulièrement et depuis quelques années sur ce credo. Le site La vie d'après propose par exemple à l'utilisateur de stocker tous les mots de passe, photos, sons et vidéos qui seront légués aux proches une fois la disparition avérée. Celesteo ou LeCimetiere.net permettent, eux, de créer un espace funéraire numérique autre que Facebook pour que les proches puissent se recueillir et témoigner. Des services payants le plus souvent.

Maître Anthony Bem précise, lui, dans un billet de blog, qu'outre ces dispositifs de gestion qui peuvent présenter des lacunes et réticences, il est possible de prévoir dans son testament une clause relative à la transmission des données numériques. Dans tous les cas, que ce soit sur le papier, à l'oral, ou sur les réseaux, le plus simple demeure d'informer ses proches de ses dernières volontés numériques.