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Libération
EDITORIAL

Héroïsme

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publié le 1er février 2011 à 0h00
(mis à jour le 1er février 2011 à 7h55)

Lénine avait raison, qui s’y connaissait un peu en la matière : quand ceux d’en bas ne veulent plus et que ceux d’en haut ne peuvent plus, la révolution triomphe. Le peuple égyptien a déclaré - avec quelle force, avec quel courage ! - qu’il ne voulait plus. L’armée égyptienne - avec une intelligence quelque peu contrainte - a proclamé qu’elle ne pouvait plus. La révolution d’Egypte est en marche : qui pourrait désormais l’arrêter ?

Le pouvoir n'est pas au bout du fusil, car ce fusil ne tire pas. Il faudrait un hymne nouveau à ce peuple égyptien qui se met symboliquement à la francophonie. Ce ne sont plus les braves soldats du 17e qu'il faut saluer. Ce sont les soldats égyptiens qui fraternisent avec la foule et les généraux qui, dit-on, se sont divisés pour laisser finalement les moins répressifs l'emporter. Le raz-de-marée de la liberté balaie les séides du raïs comme jadis la mer Rouge avait noyé ceux de Pharaon. Il y en aura encore pour dire que les valeurs démocratiques ne sont pas universelles. Il y aura des Cassandre pour déceler, derrière le déferlement populaire, l'ombre silencieuse des Frères musulmans. Dans une société égyptienne où le fondamentalisme progresse depuis des décennies, le risque n'est pas mince. Mais l'heure n'est pas aux lugubres prophéties, qui sont depuis des semaines démenties avec gloire par l'insurrection des peuples. L'heure est à la célébration de l'héroïsme populaire, qui fait trembler les tyrans et basculer l'Histoire. Une grande