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Libération
Béziers

Robert Ménard fait sa com sur le TGV avec une photo de femme sur le point de mourir

La secrétaire d’Etat chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, a dénoncé lundi une «odieuse» campagne d’affichage du maire de Béziers, qui réclame le TGV dans sa ville avec une illustration «humoristique» montrant une femme proche de se faire écraser par un train.
Détail d'un visuel conçu par la mairie de Béziers pour la promotion du projet TGV Occitanie. (DR)
publié le 11 décembre 2017 à 17h45

Coutumier des opérations de communication outrageantes dans sa ville et des unes vulgaires dans son journal municipal, le maire de Béziers, Robert Ménard, a réussi à faire parler de lui, ce lundi, en présentant plusieurs affiches de campagne, sur un thème a priori difficilement sujet à dérapage à moins d'y mettre du sien, mais l'élu apparenté FN y est arrivé quand même : un projet de ligne à grande vitesse en Occitanie.

Pour rappel, cette histoire de LGV dans la région permettrait de joindre Bordeaux à Montpellier en passant par Toulouse, en TGV, incluant un tronçon reliant Béziers à Perpignan, pour «ouvrir l'Europe à ce sud de la France». Il y a eu une déclaration d'utilité publique en 2016, mais ça coûterait huit milliards d'euros à l'Etat. Le gouvernement doit aborder la question dans une loi de programmation des infrastructures début 2018, mais a déjà prévenu que le président Macron avait décrété une «pause» dans les grands projets de transports.

De quoi justifier une action, s'est dit Ménard, car «on attend depuis trente ans» (en réalité deux fois moins). Du coup, l'élu a placardé 125 posters partout dans Béziers «pour protester». «On utilise tous les moyens pour attirer l'attention sur ce scandale», s'emballe-t-il. Les «moyens», ce sont cinq illustrations à valeur «comique», à condition d'apprécier l'humour de droite extrême : sur l'une, une femme est attachée à une voie de chemin de fer sur un pont, hurle car une loco arrive à pleine balle, avec une légende qui dit «avec le TGV, elle aurait moins souffert». Certains ont vu dans cette illustration un parallèle «ignoble» avec un féminicide survenu en juin et encore dans les mémoires collectives : une femme de 34 ans assassinée dans l'Eure-et-Loir par son mari, qui l'avait attachée à des rails au passage d'un Paris-Nantes.

L'affaire énerve d'autant plus que Ménard n'en est pas à son coup d'essai. En septembre, sa ville avait démoulé son agit-prop mensuelle avec un poster où l'on voyait un homme étrangler une femme, dans une métaphore vaseuse sur le poids de l'Etat sur les municipalités. A l'époque, un collectif de droits des femmes avait saisi le tribunal administratif pour obtenir le retrait rapide de l'image, mais avait été débouté.

Cette fois la secrétaire d'Etat chargée de l'Egalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, est montée au créneau, dénonçant sur Twitter une «campagne une fois de plus odieuse, de surcroît venant d'un élu de la République». «J'ai saisi ce matin le préfet [de l'Hérault, Pierre Pouëssel, ndlr] afin que tous les recours possibles soient étudiés et activés», a-t-elle prévenu. Pouëssel a quant à lui dénoncé «une campagne d'affichage marquée au sceau de la vulgarité». Ménard «se sert du corps de la femme pour faire passer des messages populistes et la met en scène en victime de violences», a-t-il dit.

Réaction du maire de Béziers : «Je ne connaissais pas ce fait divers. J'ai honte pour Schiappa qui l'instrumentalise à des fins politiques. Ces affiches sont humoristiques, c'est une image de western, c'est du troisième degré, je ne comprends pas qu'on soit choqué. Dans ce cas on peut aussi interdire Charlie et brûler les revues Hara-Kiri» Mais surtout pas arrêter de parler de lui.