C’est une de ces journées dont le commun des mortels aime se délecter. Douce, avec juste ce qu’il faut de rayons de soleil. Paradoxalement, c’est aussi une de celles qui ravivent les angoisses de Myriam : «Dès qu’on recommence à entendre les oiseaux, ça veut dire que les beaux jours arrivent et le travail aussi.» Myriam, 58 ans, est agricultrice céréalière dans le nord de l’Alsace. Elle a accepté de parler du mal-être qui la ronge depuis sept ans. Frêle, regard bleu azur et cheveux immaculés : d’emblée, sa fragilité transperce. A son côté, Manon, l’assistante sociale de la Mutualité sociale agricole (MSA), qui la suit depuis trois ans. «Elle avait peur que je ne tienne pas le coup», lance l’exploitante. Lorraine de naissance, fille d’agriculteurs, Myriam donne le change, disserte sur son métier et ses contraintes, tourne autour du pot pour mettre les mots. Difficile exercice, plus encore vis-à-vis de son mari, Christian, avec lequel elle travaille sur la ferme familiale transmise par ses beaux-parents, et de ses enfants. «Ils me soutiennent. Mais je ne leur ai pas dit tout ce que je ressentais, je ne voulais pas charger la mule.»
Myriam l’assure : elle n’est pas devenue agricultrice par obligation mais par amour du métier, de la nature. Encore aujourd’hui, elle ne cesse de s’extasier devant les levers et les couchers du soleil, symbole qu’elle porte en pendentif autour du cou, dans une pierre d’ambre. Avant sa reconversion comme agricultrice, elle était e