La crise du miel continue son cours, comme en atteste le rapport publié ce lundi par l’Union nationale de l’apiculture française (Unaf) sur la récolte pour 2022 : entre 12 000 et 14 000 tonnes. Une production supérieure à l’année précédente, mais toujours en deçà des espérances des apiculteurs. En cause, les fleurs et les abeilles ont souffert du manque d’eau et des épisodes caniculaires de cet été. Le secteur du miel espérait remonter la pente, après une année 2021 désastreuse. «La pire de l’apiculture française», confie sans demi-teinte l’organisation. La récolte était alors tombée entre 7 000 et 9 000 tonnes de miel.
Miel au goût de feu de forêt
«Cette année n’est pas non plus catastrophique comparé à l’an dernier», présente ainsi Henri Clément, secrétaire général de l’Unaf. Si FranceAgriMer, l’office agricole public, comptabilisait 19 802 tonnes de miel produites en 2021, pour lui, «c’est du grand n’importe quoi.» «Ils font un sondage auprès de quelques apiculteurs et multiplient simplement par le nombre de ruches. Leurs chiffres sont exagérés. Aujourd’hui, une bonne récolte, c’est autour de 20 000 tonnes. Et on est loin du compte», explique l’apiculteur de formation. Les distorsions entre les régions, très marquées, sont capitales pour se faire une idée de la production totale de miel.
Le dérèglement climatique y est pour beaucoup. Cette année encore, l’apiculture n’a pas été épargnée. Entre gelées tardives, canicules et feux de forêt, les conditions de production ne sont plus réunies. Les fortes chaleurs entraînent des floraisons de plus en plus précoces : alors qu’elles s’étalaient auparavant sur tout l’été, elles se sont achevées au mois de juillet cette année. Dans les Landes, les incendies ont gravement endommagé la bourdaine et la bruyère, empêchant totalement les miellées. Des conditions qui se répercutent sur le consommateur. La qualité de ces floraisons influe sur la saveur et la quantité de miel produit.
Des récoltes imprévisibles
«Ce qu’il faut bien retenir, c’est que les récoltes sont de plus en plus aléatoires et imprévisibles», poursuit Henri Clément, qui souligne que les effets du dérèglement climatique se ressentent particulièrement sur le pourtour méditerranéen. Et sur la santé des abeilles. Au-delà d’une certaine température, les fleurs ne produisent plus de nectar, dont se nourrissent ces insectes butineurs. Une situation qui inquiète tout le secteur. «Certains apiculteurs se demandent si leur cheptel parviendra à survivre à l’hiver dans de bonnes conditions», s’alarme ainsi l’Unaf dans son communiqué.
Les effets du réchauffement climatique sont «ressenti[s] par les apiculteurs depuis une quinzaine d’années», signale l’organisation. Le secteur du miel souhaite se renouveler. Pour affronter les prochaines décennies, les apiculteurs français se retrouvent fin octobre au congrès européen de l’apiculture Beecome à Quimper. Henri Clément anticipe : «Il faut réorienter l’agriculture vers l’agroécologie. Suppression des pesticides, diversification des cultures, plantation massive d’arbres résilients.» Avant que le secteur ne s’englue définitivement dans ce bouleversement climatique.