Chez nos voisins belges, les premiers cas de fièvre catarrhale ovine – aussi surnommée maladie de la langue bleue – avaient été recensés dès la fin juillet dans certains élevages. Face à la menace de la transmission de ce virus potentiellement mortel chez les ruminants via des insectes piqueurs, la France avait alors restreint la circulation du bétail dans un large périmètre au nord du pays. Mais le mercredi 7 août, la préfecture du Nord a confirmé la présence d’un premier foyer de fièvre catarrhale ovine dit «de sérotype 3» dans un élevage de moutons de Marpent (Nord), commune de 2 700 habitants située près de Maubeuge.
Ce foyer, «confirmé le 5 août» par l’agence sanitaire Anses, est le premier de ce sérotype repéré dans l’Hexagone, «la maladie étant jusqu’alors présente uniquement aux Pays-Bas, en Allemagne et en Belgique», souligne la préfecture. Selon les informations de la France agricole, le virus a été identifié dans un troupeau comptant quinze moutons. Un seul animal avait, jusque là, été testé positif. «Ça ne s’arrêtera pas à un seul cas, on est parti pour une mauvaise période», anticipait alors Simon Ammeux, président de la FRSEA Hauts-de-France, fédération régionale du syndicat agricole FNSEA.
Ce jeudi, dès le lendemain donc, au moins 22 suspicions de fièvre catarrhale ovine de sérotype 3 ont été recensées dans le département du Nord - dans deux à trois élevages dans le Nord et trois à quatre dans l’Aisne. La préfecture précise qu’à «chaque suspicion, un vétérinaire se déplace. Des prélèvements et des analyses sont effectués». Elle ajoute qu’ «en cas de contamination, l’animal doit être isolé et désinsectisé». Les éleveurs craignent déjà une expansion «dramatique» de la maladie.
Une maladie qui pourrait entraîner des «taux de mortalité élevés»
La fièvre catarrhale ovine (FCO), qui n’est pas transmissible aux humains, était déjà présente en France avec les sérotypes 4 (en Corse) et 8 (en France continentale). Mais les cheptels français n’ont au contraire développé aucune résistance au sérotype 3, auquel ils n’ont jamais été confrontés. Ce sérotype provoque chez les animaux touchés «une forte hyperthermie, de la fièvre, des essoufflements, des troubles respiratoires, des cyanoses de la langue, des hémorragies», explique à Libération Jeanne Brugère-Picoux, vétérinaire et professeure honoraire de l’Ecole nationale vétérinaire d’Alfort.
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Selon la sévérité, «on peut aussi noter des atteintes au fœtus, des torticolis, et en dernier stade, la mort». Le taux de mortalité de ce virus reste cependant «très variable» poursuit la vétérinaire. Et d’ajouter : «On peut aller de quelques pourcents seulement à plus de 50 %. Et ce sérotype 3 a l’air particulièrement dangereux : il pourrait entraîner des taux de mortalité élevés chez les moutons.» D’où l’inquiétude des autorités. La maladie, aussi connue comme «maladie de la langue bleue», n’entraîne toutefois pas l’euthanasie des animaux, contrairement à la grippe aviaire.
«La fièvre catarrhale ovine n’est pas une maladie contagieuse, mais transmissible par des moucherons piqueurs. C’est vraiment le moucheron qui est en cause. Et bien sûr, dès qu’il fait chaud, les moucherons piqueurs se multiplient et augmentent de fait les risques de transmissions», poursuit la vétérinaire, qui s’inquiète d’une prolifération du virus avec les températures élevées enregistrées ces derniers jours.
Des vaccins mis à disposition par l’Etat
«Le sérotype 3 est une menace pour le cheptel ovin français puisque c’est un virus qui induit des manifestations cliniques qui peuvent être assez conséquentes. […] Très clairement, il y a des ovins qui meurent» dans des proportions variables d’un élevage à l’autre, avait aussi observé fin juillet le directeur du laboratoire de santé animale de l’Anses, Stéphan Zientara.
Le ministère de l’Agriculture a par ailleurs annoncé la mise à disposition gratuite à partir du 14 août prochain de vaccins contre ce sérotype pour les éleveurs de la zone réglementée, volontaires pour vacciner leurs animaux. Ces vaccins seront «mis à disposition gratuitement par l’Etat». Dans le détail, ce sont 600 000 doses de vaccins qui ont été prévues pour vacciner autant d’ovins. «Il est urgent de vacciner les cheptels afin de limiter au maximum la transmission du virus, qui peut être très rapide», conclut la professeure de l’Ecole nationale vétérinaire d’Alfort.
Mise à jour : à 14 heures 45 avec les cas suspects.