Pour la première fois depuis l’automne, Nathalie (1) ressent «un sentiment de sécurité». «Ce qui s’est passé avec Lactalis, on ne peut pas revivre la même chose avant la retraite.» Elle et son mari ne regrettent pas d’avoir fait plus d’une heure de route depuis leur ferme des montagnes pour visiter l’usine d’Aboncourt-Gésincourt (Haute-Saône), et rencontrer les dirigeants de Pâturages comtois. Le couple a apprécié la franchise des représentants de la coopérative : personne n’a tenté de dissimuler les difficultés économiques passées, liées au ralentissement des exportations de fromage dû à la guerre en Ukraine. Derrière eux, une douzaine d’autres éleveurs se rassemblent par trois ou quatre autour des tables couvertes du gruyère, du brie et de la cancoillotte fabriqués sur place.
En septembre, tous dans la salle ont appris la nouvelle de la même façon que les 260 autres éleveurs concernés dans le pays : par la presse. La lettre confirmant que Lactalis arrêterait de collecter leur lait est arrivée quatre mois plus tard, fin janvier. La multinationale y annonce sans détour la «fin de la relation contractuelle» afin de «réduire son exposition aux fluctuations des marchés internationaux» pour mieux payer les autres. La sentence, explique le