«On est rentrés, mais pas dans la joie.» Font-ils preuve d’amertume, de fatalisme ou de scepticisme ? Sûrement les trois à la fois. Pourtant, Lydie, Cédric, Marine et Edouard parlent encore de leurs journées, soirées et nuits sur le barrage de l’A6, à une poignée de kilomètres de Paris, le sourire aux lèvres. Le soutien des citoyens, la solidarité entre agriculteurs, et même la couverture médiatique sont autant de bons souvenirs. On ressent aussi une pointe de fierté. Pendant presque trois semaines, des paysans se sont rassemblés devant des préfectures, ont bloqué des supermarchés, puis les autoroutes menant aux grandes villes de France et à Paris. Soudain, jeudi 1er février, une poignée d’heures après une nouvelle salve d’annonces de Gabriel Attal, leurs dirigeants de la FNSEA et des Jeunes Agriculteurs (JA), les deux syndicats majoritaires, les ont renvoyés chez eux. Suivis par la droitière et virulente Coordination rurale. Seuls les agriculteurs bio et la Confédération paysanne continuent de se mobiliser sur le terrain. Mais de retour chez eux, quasiment une semaine après avoir ramené leurs tracteurs dans les fermes, les agriculteurs ne sont pas dupes.
Pendant que sa femme Marine, au volant d’un tracteur de 135 chevaux, déverse des ballots de paille pour les 65 vaches limousines que le couple élève à Chevry-sous-le-Bignon, une petite commune du Loiret, à la frontière avec la Seine-et-Marne, Edouard Caekaert analyse cette mobilisation jamais vue à l’échelle de la Fra