La viande végétale totalement grillée. Les appellations telles que «steaks de soja», «saucisse végane» ou encore «cordon-bleu au blé» ne pourront plus être utilisées, a tranché le Parlement européen ce mercredi 8 octobre. Le milieu agricole, qui voit dans ces protéines végétales une menace pour la viande, a donc gagné une manche. Pour rendre la chose concrète, il va néanmoins falloir que les eurodéputés négocient avec les 27 Etats de l’Union européenne sur la modification proposée.
«Ce n’est pas de la saucisse et ce n’est pas du steak, tout simplement, il faut appeler un chien un chien et un chat un chat», a notamment taclé la veille du vote Céline Imart, la députée européenne de droite à l’origine du texte.
Les produits végétariens imitant la viande ont connu un essor au cours des dernières années, porté par le souci des consommateurs de manger sainement ou de réduire leur empreinte environnementale, alors que les élevages sont de gros émetteurs de CO2.
Avec ce texte, débattu mardi et adopté (avec 355 voix contre 247) ce mercredi 8 octobre à Strasbourg, les aliments étiquetés «saucisse», «hamburger», ou encore «escalope» ne pourraient donc être appelés ainsi que s’ils contiennent de la viande.
«Brouillage des repères» ou «diversion pour faire le buzz»
La filière Elevage et Viande française (Interbev) se félicite, elle aussi, de ce texte et «refuse que les protéines végétales s’approprient les dénominations de la viande à des fins marketings» car elles «brouillent les repères et affaiblissent la reconnaissance d’un produit brut et 100 % naturel».
Sans «protection claire, les consommateurs risquent d’être trompés par des produits qui empruntent les codes de la viande sans en être, déclare son président Jean-François Guihard. Ces dénominations doivent garantir une distinction nette entre deux produits fondamentalement différents.»
A l’inverse, les opposants au texte, à l’image de l’eurodéputée écologiste néerlandaise Anna Strolenberg, dénoncent une controverse qui n’est qu’un «écran de fumée». «Une interdiction des Veggie Burgers ne changera rien pour les éleveurs», raille-t-elle. Cette loi est une «diversion pour faire le buzz», appuie également son collègue vert David Cormand. «On passe à côté des sujets majeurs pour l’agriculture.»
Une bataille menée depuis 2020
Ce n’est pas la première fois qu’un tel texte est débattu au Parlement. En 2020, les eurodéputés avaient rejeté une loi visant à interdire les appellations de «steak» ou «burger» pour des produits végétariens sans viande animale. Mais les élections européennes de 2024 ont changé l’équilibre des partis, accordant plus de places aux députés de droite, qui revendiquent leur proximité avec le secteur agricole.
Cette initiative s’inscrit alors dans une «logique de cohérence avec la réglementation européenne, qui protège déjà les termes issus des produits laitiers» de leurs alternatives végétales. «Il est légitime d’en faire de même pour la viande», plaide Céline Imart.
Au contraire, pour Nicolas Schweitzer, le PDG de la marque française «la Vie», qui fournit Burger King en «bacon végétal», «le but n’est pas de nuire aux éleveurs». «Ce sont des produits qui cochent toutes les cases qui adressent toutes les problématiques de bien-être animal, d’élevage intensif, de réchauffement climatique… Ça devrait être encouragé pas complexifié», estime-t-il.
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Ce dossier déchaîne également les passions en France, où un décret proposant lui aussi d’interdire ce type d’appellation avait été pris en 2024 afin d’apaiser la colère des agriculteurs. Mais il avait ensuite été annulé par le Conseil d’Etat fin janvier 2025, dans la foulée d’une décision de la Cour de justice de l’Union européenne estimant qu’un «Etat membre ne saurait empêcher, par une interdiction générale et abstraite, les producteurs de denrées alimentaires à base de protéines végétales» d’utiliser des «noms usuels ou (des) noms descriptifs».
Mise à jour à 13 h 09 avec le vote du Parlement européen.