Emmanuel Macron veut «limiter l’activité» des chaluts de fond dans certaines zones des aires marines protégées (AMP) françaises, a-t-il annoncé dans un entretien publié samedi 7 juin au soir par Ouest-France.
«Il y a des endroits où il faut limiter leur activité, qui en raclant le fond, vient perturber la biodiversité et des écosystèmes qu’il faut apprendre à protéger», a déclaré le chef de l’Etat, au cours d’un entretien avec plusieurs quotidiens de la presse régionale, publié à deux jours du sommet de Nice sur les océans.
Un travail «très précis» avec des scientifiques et les pêcheurs a été réalisé pour aboutir à une «cartographie qui fait l’objet d’un consensus», et qui sera présentée par la ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher, a-t-il ajouté, appelant à ne pas non plus «stigmatiser» les pêcheurs, «des hommes et des femmes qui travaillent dur».
Reportage
Technique de pêche peu sélective et gourmande en carburant, le chalutage de fond est vivement critiqué par les ONG qui dénoncent son impact destructeur sur les habitats marins, et demandent son interdiction dans l’ensemble des aires marines protégées (AMP).
Des annonces reçues avec scepticisme par les ONG
Dans la foulée de ces annonces du chef de l’Etat, les ONG environnementales, qui saluent «un bon premier pas», pointent néanmoins du doigt une annonce sans grande envergure. «Le président a mis en scène l’annonce… du statu quo !», a ainsi vilipendé l’association Bloom dans un communiqué diffusé ce dimanche, estimant qu’Emmanuel Macron avait «confirmé que l’imposture de la politique de protection maritime de la France se poursuivrait, à savoir qu’il n’existerait jamais de cadre contraignant pour protéger véritablement les aires marines dites protégées.»
De son côté, Greenpeace souligne qu’il «y a un tout petit peu de progrès sur la formulation : le chalutage de fond a pris la place qu’il mérite» dans la communication gouvernementale. Cependant, «on a l’impression qu’il annonce qu’il ne va rien annoncer», ajoute l’ONG, déplorant le «peu d’ambition» des déclarations du président. Greenpeace plaide pour une interdiction du chalutage de fond dans 30 % des eaux françaises classées en aires marines protégées.
L’ONG Oceana salue pour sa part «un bon premier pas», selon les mots de son porte-parole Nicolas Fournier, car «jusqu’à présent, c’était tabou de parler de ces questions-là.» Le chalutage de fond a en effet été pratiqué pendant 17 000 heures dans les aires marines protégées françaises en 2024, selon un rapport publié en mai par Oceana, qui appelle à bannir la pratique.
L’objectif européen atteint «dès le 1er janvier 2026»
Jeudi, l’UE a présenté sa stratégie pour mieux protéger les océans, qui s’en tient à une simple recommandation de mettre fin à cette pratique de pêche à l’horizon 2030 dans les aires protégées. A ce jour, 33 % des eaux françaises sont couvertes par au moins une AMP, mais la plupart d’entre elles autorisent toutes les pratiques de pêche.
Dans son entretien à la presse régionale, Emmanuel Macron ainsi a annoncé un renforcement de la protection de ces AMP dans des «zones qui ont fait l’objet d’un consensus», citant par exemple Port-Cros dans le Var, les Calanques près de Marseille, la Corse ou la façade Atlantique.
Avec ce renforcement de la protection, la France atteindra l’objectif européen de placer sous protection forte 10 % de son domaine maritime «dès le 1er janvier 2026», avec quatre ans d’avance sur le délai fixé, a assuré le Président. Les zones sous protection haute ou intégrale, le niveau le plus strict de protection, plafonnent actuellement à 2,6 % du domaine maritime français, chutant même à moins de 0,1 % en métropole.
La France a en outre défini un régime juridique de la «protection forte» qui est critiqué par les ONG car il n’est pas aligné sur les définitions internationales de l’Union européenne ou de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).
Mise à jour le 8 juin à 11 h 55 avec les réactions des ONG.