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Biodiversité

Aquarium de Paris : le réveillon festif critiqué par les défenseurs du bien-être animal

Des défenseurs de la cause animale protestent contre la volonté de l’aquarium du Trocadéro d’organiser une soirée festive dimanche 31 décembre, qui risquerait de nuire à la santé des poissons et d’enfreindre la loi. Le patron du lieu, habitué de ces événements, défend son bon droit.
Des manifestants de l'association PAZ rassemblés à proximité de l'aquarium de Paris, jeudi 28 décembre 2023. (Stéphane de Sakutin/AFP)
publié le 30 décembre 2023 à 9h12

Cotillons et poissons. Pour fêter le passage en 2024, l’aquarium de Paris a prévu d’ouvrir ses portes dimanche 31 décembre aux fêtards, leur promettant «un Nouvel an d’exception dans un cadre féerique». A deux pas du Trocadéro, quelque 1 500 détenteurs de billets – dont les prix vont de 50 à 1 260 euros – pourront se déhancher «devant le plus gros bassin de France, avec des milliers de poissons et les plus jolis spécimens du monde entier», promet une communication de l’événement. Mais le message ne passe pas pour des défenseurs de la cause animale.

Plusieurs membres de l’association Paris Animaux Zoopolis (PAZ) ont protesté jeudi contre cette initiative, susceptible, selon eux, de nuire au bien-être animal. «Les poissons ne sont pas des attractions ni des décorations, dénonce ainsi la cofondatrice de PAZ, Amandine Sanvisens. Non seulement les animaux sont prisonniers des aquariums, mais ils sont en plus dérangés la nuit par le son et la lumière.» L’organisation antispéciste estime que ces soirées sont illégales et qu’elles enfreignent une loi de 2021 luttant contre la maltraitance animale et interdisant de «présenter des animaux domestiques ou non domestiques […] en discothèque».

Pas de «comportement anormal chez les animaux»

Des accusations que nie fermement auprès de Libération le président de l’aquarium, Alexis Powilewicz. Celui-ci martèle que ces soirées nocturnes, «organisées depuis 2006», n’ont aucun impact sur ses protégés à écailles. Il s’appuie sur un contrôle de la direction départementale de la protection des populations (DDPP) de 2019, stipulant selon lui que «les parois des bassins font 36 centimètres, plus que du triple vitrage» et que «les bassins sont plongés dans un éclairage nocturne qui ne perturbe pas le sommeil des poissons». «Les rapports vétérinaires n’ont jamais montré un seul comportement anormal chez les animaux que la PAZ pointe», poursuit le directeur de l’établissement. Celui-ci estime aussi respecter la loi de 2021 : «Il n’y a aucune exhibition de poisson car nous ne les sortons pas de leurs bassins. Ils restent tranquillement dans l’eau.»

Un autre exemple peut néanmoins donner de l’espoir aux associations de défense des animaux. Dans une décision rendue en février 2022, le tribunal administratif de Paris avait ainsi partiellement donné raison à l’ONG Sea Shepherd, qui réclamait déjà la fin de ces soirées dansantes dans l’aquarium. La justice avait alors estimé que l’autorisation de la structure ne visait que la «présentation au public d’espèces animales», et non pas l’organisation de soirées. La préfecture de police de Paris avait alors été enjointe à «mettre en œuvre ses pouvoirs» pour que l’aquarium régularise sa situation. Mais le contentieux est toujours en cours, confirme l’instance. «Le préfet de police de Paris n’a pas donné suite à la demande du tribunal», se défend Alexis Powilewicz, qui considère que le représentant de l’Etat a «fait une décision implicite de rejet».

La ville de Paris étudie ses options

Exhortée par l’association Paris Animaux Zoopolis «de s’opposer à ces soirées au nom de la condition animale», la ville de Paris, propriétaire des murs de l’aquarium, a assuré qu’elle ferait le point prochainement «sur les mesures mises en place» pour garantir «le respect de la réglementation.» Pas de quoi entamer la sérénité d’Alexis Powilewicz : «Le service public des aquariums municipaux a été abrogé en 2004, seule la préfecture de police a autorité», argue-t-il.

Depuis que l’aquarium de Paris est devenu un établissement privé, il se transforme régulièrement en discothèque pour certaines nuits. Une activité qui représente presque un quart de son chiffre d’affaires, «nécessaire pour financer les recherches sur le monde marin», souligne son patron. Pour Halloween, une soirée similaire avait déjà été organisée entre les bassins permettant de réaliser «un bénéfice net de 35 000 euros environ», chiffre Alexis Powilewicz. Après le réveillon, la soirée devrait rapporter environ «50 000 euros».