Pour les Hongana Manyawa, les arbres ont une âme, et ressentent des émotions. Lorsqu’ils cueillent des plantes, ils procèdent à des rituels, laissent des offrandes à la forêt luxuriante qui les nourrit, les abreuve et les protège. Ce peuple nomade de chasseurs-cueilleurs, l’un des derniers d’Indonésie, habite l’île reculée d’Halmahera, toute proche de l’équateur. Ils seraient 3 500 à y vivre et quelque 500 d’entre eux ont choisi l’isolement volontaire, refusant tout contact avec le reste de la société.
Mais la ruée vers le nickel, dont l’Indonésie est le nouvel eldorado, met leur survie en péril. Halmahera abrite la plus grande mine au monde de ce métal crucial pour la transition énergétique, Weda Bay Nickel. Ouverte en 2019, la concession s’enracine au cœur d’une forêt ancestrale, haut lieu de biodiversité, avec une faune et une flore d’une richesse inestimable et particulièrement sensible. Pourtant, le site, qui compte quinze gisements sur 47 000 hectares, étend peu à peu ses fosses, ses routes et ses engins vers les terres autochtones.
En 2024, les deux principaux actionnaires de Weda Bay, le géant français Eramet (38,7 % des parts) – dont l’Etat français possède 27 % du capital – et la société chinoise Tsingshan (51,3 %), numéro 1 mondial de l’acier inoxydable, ont déposé une demande auprès du gouvernement indonésien pour tripler la production. La mine, qui a un permis d’exploitation de 32 millions de tonnes humides par an (Mth) pour la période 2024-2026, contre 18 Mth/an