Sous pression dès sa première sortie. En déplacement le jeudi 3 octobre au sommet de l’élevage de Cournon, près de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), et pour la première fois sous la casquette de ministre de l’Agriculture, Annie Genevard venait a priori avec de quoi apaiser les éleveurs : la mise en place d’un fonds d’indemnisation pour aider les éleveurs touchés par la perte de leur bétail malade de la fièvre catarrhale ovine. Mais les agriculteurs l’ont interpellé sur un tout autre sujet, rapporte France Info : la présence du loup.
La prédation du loup est revenue au cœur des préoccupations, suite au message polémique du président de la chambre d’agriculture de Haute-Saône, Thierry Chalmin adressé le 23 septembre aux éleveurs. Dans le courrier publié le 3 octobre par le quotidien régional l’Est républicain, Thierry Chalmin les appelle à s’armer et à tirer sur les loups afin de protéger leurs troupeaux. Considérant «qu’il y a carence de l’Etat et de la République» dans la protection de l’intégrité des personnes, il enjoint les éleveurs «à protéger [eux] mêmes [leurs] biens, à sortir armés et à «taper un loup» s’ils en voient un.
Face à cet appel à prendre les armes, Annie Genevard souhaite l’apaisement : «je pense que ce n’est pas du tout la bonne façon d’approcher le sujet. Je comprends ce qui la motive, mais je pense que les choses doivent se traiter différemment et dans le respect. Je dis que les agriculteurs qui feraient cela se mettraient en défaut vis-à-vis de la loi parce que c’est illégal. Donc on ne peut pas inviter les agriculteurs à se mettre dans l’illégalité». «Les appels à la destruction de cette espèce protégée sont irresponsables» et «les auteurs d’actes en dehors du cadre légal s’exposent à de lourdes sanctions», avait déjà réagi la veille Agnès Pannier-Runacher, la ministre de la Transition écologique, dans une déclaration à l’AFP. Ces éleveurs risquent en effet jusqu’à trois ans de prison et 150 000 euros d’amende.
Plusieurs incitations à tuer le loup
Cette incitation à tuer le loup n’est pas un cas isolé. Cet été, en Haute-Vienne, le syndicat agricole la Coordination rurale a annoncé offrir 1 000 euros pour chaque loup tué. Une colère des éleveurs justifiée par l’augmentation des attaques du loup en France. Dans les Alpes-Maritimes par exemple, le nombre de bêtes tuées par le loup est en hausse de 20 % en 2023, soit 1 750 bêtes tuées, selon le syndicat d’éleveurs du département.
Face aux attaques, l’abattage de loups est prévu par la loi selon des règles strictes. Le dernier plan loup présenté l’an dernier par le gouvernement prévoit une simplification des procédures de tir, une hausse du taux de «prélèvement» si l’évolution de la population lupine le permet. Il est actuellement fixé à 19 %, autorisant la «destruction» de 209 loups en 2024, comme l’année précédente. En France, 1 104 loups ont été recensés en 2023. En 2022, les indemnisations pour des dégâts causés par les loups s’élevaient à 4 millions d’euros dans le pays.
Biodiversité
Le 25 septembre 2024, les Etats membres de l’Union Européenne ont annoncé abaisser le statut de protection du loup, allant dans le sens des éleveurs et malgré la levée de boucliers des associations écologistes. Le statut du loup va passer d’une «protection stricte» à une «protection simple», qui permettrait d’éliminer plus facilement les loups quand ils sont jugés trop nombreux dans certaines régions, mais avec des quotas de chasse.