C’est officiel : la grippe aviaire a atteint l’Antarctique pour la première fois, ont confirmé les autorités espagnoles. Le virus H5N, hautement pathogène, a été mis en évidence, vendredi 23 février, sur les cadavres de deux oiseaux charognards appelés labbes, près de la base Primavera, une station de recherche scientifique argentine située dans le nord de la péninsule.
Il s’agit des premiers cas confirmés sur le continent lui-même, signe que l’épidémie, qui a tué des millions d’oiseaux sauvages dans le monde, se propage dans la région, très probablement par l’intermédiaire des oiseaux migrateurs. Le virus avait d’abord été signalé en octobre en Géorgie du Sud, un territoire britannique à environ 1 600 km du continent antarctique, puis dans les îles Malouines, à 970 km à l’ouest de la Géorgie du Sud. Ses victimes ? Les goélands, les labbes, les sternes, les albatros ou les manchots. Mais aussi des mammifères : on a observé une mortalité massive chez les éléphants de mer et les otaries. Et des ravages semblables sont à l’œuvre de l’autre côté du globe, parmi les populations d’animaux sauvages de l’Arctique. En décembre, il a été attesté que, pour la première fois, un ours polaire était mort à cause de cette infection. «De nombreux rapports font état d’une grippe aviaire hautement pathogène affectant plusieurs espèces dans les régions antarctiques cette saison, résume Matthew Dryden, de l’Agence britannique de sécurité sanitaire. Il est possible qu’elle n’ait pas été signalée sur le continent antarctique jusqu’à présent en raison des difficultés d’accès et d’échantillonnage de la faune sauvage.»
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Dans la péninsule antarctique, les oiseaux morts découverts par des scientifiques argentins ont été envoyés pour analyse à des chercheurs du Centre de biologie moléculaire Severo-Ochoa de Madrid, qui travaillent sur la base antarctique espagnole de l’île de la Déception. «Le problème est de savoir combien de temps il faudra avant que [le virus] ne se transmette à d’autres espèces comme les manchots. Nous devons surveiller cela, souligne Antonio Alcamí, du Conseil national de la recherche espagnol, qui a effectué les tests sur les carcasses. Je crains qu’il ne se transmette aux manchots. Les labbes vivent assez près et il y a donc de nombreuses possibilités de transmission, mais nous verrons bien.» Une crainte partagée par Diana Bell, professeure émérite de biologie de la conservation à l’université d’East Anglia, au Royaume-Uni : «Il semble peu probable que les manchots ne soient pas infectés.»
Les vagues épidémiques précédentes, en Afrique du Sud, au Chili et en Argentine, ont montré que les manchots sont sensibles au virus. Rien qu’en Amérique du Sud, plus de 500 000 oiseaux marins (manchots, pélicans et fous en particulier) sont morts de la grippe aviaire.