Menu
Libération
Reportage

«On se fait envahir» : à la chasse aux cerfs nuisibles avec un broussard de Nouvelle-Calédonie

Article réservé aux abonnés
La biodiversitédossier
Dans l’archipel, les 300 000 cerfs de Java éradiquent la flore endémique, fragilisent les sols et disputent les herbes au bétail, alors la chasse privée, de facto interdite depuis la prohibition des armes en mai, est un moyen de régulation. «Libé» a suivi un broussard dans la traque nocturne de cette espèce invasive.
L’Agence néo-calédonienne de la biodiversité a estimé sa population totale à plus de 300 000, pour une densité moyenne de 20 bêtes au km². (Theo Rouby/Theo Rouby)
par Maïté Darnault, Envoyée spéciale en Nouvelle-Calédonie
publié le 12 octobre 2024 à 12h53

Debout dans la benne arrière, trois hommes s’accrochent, à l’affût. L’un balaie avec un projecteur la brousse plongée dans le noir, tandis que le pick-up dodeline au milieu de grosses mottes de terre. «Là ! Là !» Deux coups secs sont donnés sur le toit du 4x4, où une carabine repose sur un trépied. Elle est équipée d’une lunette et d’un silencieux «pour que ça résonne moins dans les vallons». Le conducteur stoppe et éteint ses phares. Le faisceau révèle des points brillants, comme des étoiles piquées dans la colline. Ce sont les yeux de cerfs, qui marquent l’arrêt à l’approche du véhicule. Un premier coup de feu claque. «Loupé !» «Faut pas bouger le projo, sinon tu accélères la bête. Vise la tête ou le cou pour que la viande soit bonne», conseille Armand (1), au volant. Une harde d’une dizaine de cerfs détale à portée de visée. «Eclaire pas trop, ils vont s’arrêter dans le sale.»

«Le sale», c’est ce qu’il reste de la forêt sèche, enchevêtrement d’herbes hautes, d’arbustes et d’arbres. Armand redémarre, la traque reprend. En Nouvelle-Calédonie, la loi interdit la chasse nocturne «en tout temps, pour toutes catégories d’animaux et en tout lieu», qui plus est en faisant «usage d’un foyer lumineux», qui rend les animaux plus faciles à repérer.