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Biodiversité

«Un pur massacre» : en Suède, 152 ours bruns tués en deux jours

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Dans le pays, la saison de la chasse a rouvert le 21 août. Le gouvernement a autorisé l’abattage de 486 ours, soit 20 % de la population totale d’ursidés sur tout le territoire. Le mammifère à l’épaisse fourrure est pourtant une espèce strictement protégée au sein de l’Union européenne.
A Ljusdal, dans le comté de Gävleborg, en Suède, le 21 août 2020. (Adam Ihse/TT News Agency.AFP)
publié le 23 août 2024 à 17h45

Traqués, puis abattus pour le plaisir du trophée. En Suède, plus de 152 ours bruns ont été tués entre le 21 août, date d’ouverture de la chasse visant l’ursidé, et le 23 août. Un «pur massacre», dénoncent des militants écologiques dans le quotidien britannique The Guardian, qui devrait se poursuivre jusqu’au 15 octobre, le gouvernement ayant autorisé l’abattage de 486 de ces mammifères (20 % de la population totale) sur le territoire. Cette tradition nationale, soutenue et encouragée par l’Etat suédois, suscite de plus en plus de controverse au sein de la population. A tel point que des policiers sont obligés d’assurer, à l’aide de drones, la protection des chasseurs pendant les battues.

De fait, ces cinq dernières années, les ours bruns – pourtant une espèce strictement protégée et dont la chasse est interdite en Europe – sont littéralement exécutés dans le pays. En 2023, 722 de ces animaux sauvages ont été piégés puis abattus. La situation s’aggrave en partie à cause des autorités, qui ont assoupli plusieurs réglementations de chasse en 2019, accusent les défenseurs de l’environnement. Depuis, les braconniers peuvent utiliser des appâts, des caméras et des chiens – des pratiques auparavant illégales. Cette année, plus de 1 400 demandes d’utilisation d’appâts ont été enregistrées par les administrations locales, soit le double de l’an dernier, selon le Guardian.

Appât, caméra, chien…

Pour attirer les ursidés, les braconniers déposent maintenant des barils de nourriture dans la forêt puis, autour, installent des caméras envoyant des alertes à l’approche d’un ours. Lorsqu’un mammifère est repéré par le système de surveillance, les chasseurs lâchent les chiens sur lui avant de l’achever. Avec ce genre de méthodes, l’animal à l’épaisse fourrure n’a aucune chance d’échapper au coup de fusil. Ainsi, en 2008, les bois suédois abritaient près de 3 300 ours bruns. A l’heure actuelle, ils ne sont plus que 2 400, ce qui équivaut à une baisse de 28 %. Pourtant, rien ne justifie un tel acharnement : l’Ursus arctos – de son nom latin – n’attaque que très rarement les moutons des éleveurs ou les Suédois eux-mêmes. Au cours du siècle dernier, deux personnes ont été tuées lors d’une traque à l’ours.

Inquiètes, les associations de protection de la vie sauvage craignent que l’histoire se répète. Pendant les années 1920, l’espèce avait failli disparaître de Suède à cause de la chasse intensive. Aussi, si le rythme d’abattage se maintient ces prochaines années, leur nombre pourrait descendre en-dessous des 1 400, seuil jugé nécessaire pour maintenir une population viable par le gouvernement suédois. Les ours bruns ne sont d’ailleurs pas les seuls visés. En 2023, l’Europe avait déjà épinglé le pays nordique pour avoir attribué des permis de tuer le lynx et le loup. Cette année, les associations environnementales norvégiennes ont appelé le gouvernement suédois à ne pas perpétrer le «massacre» des ours bruns. Mais celui-ci continue de faire la sourde oreille.