Sans la surchauffe du climat, la récente canicule aurait été bien moins intense, indique une analyse menée par plus d’une dizaine de chercheurs de cinq institutions européennes rendue publique mercredi 9 juillet. «Nous estimons que le réchauffement climatique a amplifié la vague de chaleur d’environ 2 à 4 °C» dans la plupart des douze grandes villes européennes considérées, notamment Paris, Londres et Madrid, révèle le climatologue Ben Clarke de l’Imperial College de Londres, qui a mené cette «étude rapide» jugeant cet événement extrême au regard du réchauffement du climat avec la London School of Hygiene and Tropical Medicine.
Entre fin juin et début juillet, les températures ont largement dépassé les 40 °C dans de nombreux pays européens, lors d’une exceptionnelle et précoce vague de chaleur, qui a déclenché de nombreuses alertes sanitaires.
«Des tueuses silencieuses»
Pour évaluer l’influence du changement climatique, les scientifiques ont simulé l’intensité de cet épisode dans un monde qui n’aurait pas connu la combustion massive du charbon, du pétrole et du gaz, en partant des données météo historiques.
Ils concluent que la vague de chaleur «aurait été de 2 à 4 °C moins intense» sans le changement climatique dans 11 des 12 villes étudiées. Ces degrés supplémentaires ont considérablement accru le risque sanitaire pour leurs 30 millions d’habitants, en particulier à Paris, Londres ou Madrid. «Pour certains, c’est encore un temps chaud et agréable, commente le chercheur Ben Clarke. Mais pour une grande partie de la population, ça devient dangereux.»
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«Pour des milliers de personnes, une augmentation de seulement 2 ou 4 °C peut faire la différence entre la vie et la mort, renchérit Garyfallos Konstantinoudis, de l’Imperial College. C’est pourquoi les vagues de chaleur sont connues comme des tueuses silencieuses : la plupart des décès surviennent dans les maisons et les hôpitaux, à l’abri des regards, et sont rarement signalés.»
Les vagues de chaleur sont particulièrement dangereuses pour les personnes âgées, les malades, les jeunes enfants, les travailleurs en extérieur et toute personne exposée à des températures élevées pendant de longues périodes sans répit, en particulier lors de l’enchaînement de nuits chaudes. De larges territoires du sud de l’Europe ont connu des successions de «nuits tropicales», lorsque les températures ne baissent pas assez pour permettre au corps de récupérer.
Bilans officiels dans plusieurs semaines
S’il n’avait pas été aggravé par l’influence du réchauffement climatique, cet épisode de chaleur aurait fait moins de victimes, signale également cette étude, en attendant les bilans officiels qui seront connus dans plusieurs semaines ou mois. Pour la première fois dans ce type d’analyses sur les événements extrêmes imputables au changement climatique, les chercheurs ont essayé d’estimer le nombre de décès attribuables à la canicule dans les douze villes scrutées et la proportion de ces morts due au changement climatique.
Fondée sur des méthodes scientifiques évaluées par des pairs et des recherches sur les liens entre chaleur et mortalité, l’étude estime ainsi que la récente vague de chaleur a probablement causé 2 300 décès prématurés entre le 23 juin et le 2 juillet dans ces villes. Et environ 1 500 de ces personnes, soit les deux tiers, n’auraient pas péri sans les degrés supplémentaires causés par le dérèglement du climat lié aux activités humaines. La succession d’épisodes similaires a déjà provoqué des dizaines de milliers de morts prématurées en Europe au cours des étés précédents.
A l’échelle planétaire, le mois dernier a été le troisième mois de juin le plus chaud, juste derrière juin 2024 (qui était 0,2 °C plus chaud) et quasiment au même niveau (0,06 °C) que juin 2023, annonce également mercredi 9 juillet l’observatoire européen Copernicus. 2025 est ainsi la troisième année consécutive enregistrant des températures moyennes jamais vues auparavant.