Menu
Libération
Toujours pas ça

Climat : le monde produira toujours bien trop de pétrole, gaz et charbon en 2030

D’ici cinq ans, les gouvernements envisagent de produire une quantité d’énergies fossiles plus de deux fois supérieure à celle compatible avec la limitation du réchauffement de la planète à 1,5 °C, alerte un rapport publié ce lundi 22 septembre.

Une raffinerie de pétrole de Karamay, dans le nord-ouest de la Chine. (Costfoto/NurPhoto. AFP)
Publié le 22/09/2025 à 6h00

En 2030, les prévisions mondiales de production des combustibles fossiles, de loin les principaux responsables du réchauffement climatique, devraient représenter plus du double (environ 120 % de plus) de la quantité qui permettrait de limiter le réchauffement de la planète à 1,5 °C et 77 % de trop par rapport à ce qu’il faudrait pour rester sous 2 °C, soit les limites à ne pas franchir selon l’accord de Paris de 2015.

C’est le terrible constat établi par le Production Gap Report, publié ce lundi 22 septembre par divers organismes de recherche (l’Institut de l’environnement de Stockholm, l’Institut international pour le développement durable et Climate Analytics). Il compare la production de pétrole, gaz et charbon prévue par les gouvernements et les niveaux de production mondiaux compatibles avec la limitation du réchauffement à 1,5 °C ou 2 °C par rapport à l’ère pré-industrielle (1850-1900). Et force est de constater que la trajectoire n’est vraiment pas bonne.

Lancé pour la première fois en 2019, ce rapport fait quasiment le même constat à chacune de ses éditions. Le surplus de production envisagé pour 2030 était déjà de 120 % il y a six ans. Même ordre de grandeur en 2021, «les pays producteurs de pétrole, gaz et charbon prévoient d’extraire deux fois trop de combustibles fossiles d’ici à 2030», écrivait-on alors. Rebelote en 2023, avec des prévisions prévoyant «plus du double (environ 110 % de plus) de la quantité qui permettrait de limiter le réchauffement de la planète à 1,5 °C et 69 % de trop par rapport à ce qu’il faudrait pour rester sous 2 °C».

«Ils avancent avec résolution dans la mauvaise direction»

50 chercheurs ont travaillé pour extraire ces données. Selon eux, depuis 2023, les gouvernements ont encore augmenté leurs prévisions de production de charbon d’ici 2035 et de gaz d’ici 2050. La production prévue de pétrole continue à augmenter d’ici 2050.

Dans ces conditions, l’objectif d’un réchauffement climatique ne dépassant pas 1,5 °C semble caduc. «Limiter le réchauffement planétaire sous 1,5 °C n’est désormais plus atteignable», affirmaient d’ailleurs une soixantaine de climatologues de renom en juin. Neil Grant, l’un des coauteurs du rapport au sein de Climate Analytics considère pourtant «qu’il ne faut pas abandonner cet objectif». Au contraire, «nous devons prendre des mesures pour limiter l’ampleur et la durée du dépassement et ramener les températures en dessous de 1,5 °C dès que possible», écrit-il à Libération.

Malheureusement, «les gouvernements avancent avec résolution dans la mauvaise direction», déplore-t-il. De fait, même si on se projette en 2050, la production d’hydrocarbures sera 2,5 fois trop élevée pour maintenir le réchauffement sous 2 °C.

Le rapport se base sur l’analyse des vingt pays responsables de 80 % de la production de combustibles fossiles (Australie, Brésil, Canada, Chine, Colombie, Allemagne, Inde, Indonésie, Kazakhstan, Koweït, Mexique, Nigeria, Norvège, Qatar, Russie, Arabie Saoudite, Afrique du Sud, Emirats arabes unis, Royaume-Uni et Etats-Unis). 17 d’entre eux prévoient toujours d’augmenter la production d’au moins un combustible fossile d’ici 2030. Mais, bonne nouvelle, six développent désormais une production nationale de combustibles fossiles alignée sur les objectifs nationaux et mondiaux de «zéro émission nette». Ils n’étaient que quatre en 2023. Une progression donc, mais encore trop lente.