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Libération
Bonne nouvelle

Climat : l’Europe est en «bonne voie» pour atteindre ses objectifs de baisse des émissions à l’horizon 2030

L’Union européenne est bien partie pour réduire ses émissions nettes de gaz à effet de serre. Mais les engagements doivent encore être concrétisés, martèlent les organisations environnementales.
Une nouvelle ferme solaire près de Quedlinburg, en Allemagne, lundi. (Matthias Schrader/AP)
publié le 28 mai 2025 à 16h07

C’est une bonne nouvelle, qui tombe pile le jour où l’ONU avertit que les cinq prochaines années continueront à battre des records de températures moyennes mondiales. L’Union européenne est en effet en bonne voie pour atteindre ses objectifs climatiques en 2030, se réjouit la Commission mercredi 28 mai.

Après avoir évalué les plans nationaux en matière d’énergie et de climat de la plupart des Etats membres, Bruxelles constate que l’UE pourrait réduire ses émissions nettes de gaz à effet de serre d’environ 54 % d’ici à 2030, par rapport aux niveaux de 1990, tout près de son objectif de 55 %. Celles-ci ont déjà baissé de 37 % depuis 1990. Car, détaille la Commission européenne, «les Etats membres ont considérablement comblé l’écart par rapport aux objectifs en matière d’énergie et de climat à l’horizon 2030» et «considérablement amélioré leurs plans à la suite des recommandations de la Commission de décembre 2023». Et d’ajouter que «dans le contexte géopolitique actuel, cela démontre que l’UE maintient le cap sur ses engagements en matière de climat, en investissant avec détermination dans la transition vers une énergie propre et en donnant la priorité à la compétitivité industrielle et à la dimension sociale de l’UE».

«Nous devons nous appuyer sur cette dynamique»

Reste qu’atteindre cette baisse de 54 % des émissions d’ici 2030 ne se fera réellement qu’«à condition que les Etats membres mettent pleinement en œuvre les mesures nationales existantes et prévues, ainsi que les politiques de l’UE», avertit la Commission. «Nous devons maintenant nous appuyer sur cette dynamique», insiste Wopke Hoekstra, le commissaire européen en charge du climat. «Il s’agit d’un moment décisif : chaque secteur, dans chaque Etat membre, doit contribuer», intime-t-il. Les plans des Vingt-Sept (des engagements sur le papier) doivent encore être concrétisés, martèlent aussi les organisations environnementales.

Bruxelles relève par ailleurs des disparités entre Etats membres. Trois d’entre eux (la Belgique, l’Estonie et la Pologne) sont pointés du doigt pour n’avoir pas encore remis leurs plans énergie climat actualisés. Ils «doivent le faire sans délai», exhorte la Commission. Celle-ci réclame notamment aux Vingt-Sept des efforts supplémentaires pour réduire la consommation d’énergie. Sont soulignées aussi les difficultés en matière de protection des forêts et de séquestration du carbone. Cette «faiblesse de nos puits de carbone, conséquence de la détérioration de nos forêts est inquiétante et il faut y remédier au plus vite», assène l’eurodéputé centriste Pascal Canfin (Renew), tout en saluant la «bonne nouvelle» des estimations globales en 2030.

Autre motif de satisfaction pour la Commission, la plupart des pays membres se sont alignés sur son objectif d’une part de 42,5 % d’énergies renouvelables dans la consommation totale d’ici 2030. Avec une mauvaise élève du point de vue de Bruxelles, la France, même si Paris ne cesse de défendre son énergie nucléaire «décarbonée».

Atermoiements

Après le satisfecit pour 2030, le plus dur reste à faire sur la route de la neutralité climatique promise par l’Union européenne en 2050. Car les Vingt-Sept vont d’abord devoir s’accorder sur l’étape de 2040, et les négociations piétinent. Il y a plus d’un an, la Commission recommandait une baisse de 90 % des émissions de CO2 en 2040 par rapport à 1990 au sein de l’UE. Depuis, elle n’a jamais osé mettre formellement la proposition sur la table. Car certains jugent l’objectif inaccessible. D’autres, comme la France, ne cachent pas leur scepticisme et demandent des garanties sur la décarbonation de l’industrie.

Embarrassée, la Commission européenne pourrait envisager des flexibilités dans son mode de calcul en 2040, peut-être grâce à l’achat de crédits carbone sur les marchés internationaux. L’exécutif européen promet de soumettre une proposition avant l’été, et assure que l’UE sera prête pour la prochaine conférence de l’ONU sur le climat (COP 30) en novembre au Brésil.

Mais ces atermoiements inquiètent les écologistes, qui espéraient une mobilisation européenne après le retrait des Etats-Unis de Donald Trump de l’accord de Paris sur le climat. Et les ONG s’alarment d’un détricotage en règle du Pacte vert, le fameux «Green Deal» adopté lors du précédent mandat d’Ursula von der Leyen.

Confrontée à la concurrence chinoise et aux menaces douanières de Donald Trump, l’Union européenne a en effet entamé un virage pro business ces derniers mois. Report de la loi contre la déforestation, suspense sur l’avenir d’un texte consacré à la «vigilance» environnementale des multinationales… : Bruxelles entend réviser une série de lois, au nom de la lutte contre la «bureaucratie». Et le contexte a changé au sein des Vingt-Sept avec la montée de l’extrême droite.

La socialiste espagnole Teresa Ribera, vice-présidente de la Commission en charge de la transition, a peiné à se faire entendre jusqu’ici. Avec les résultats du jour, l’Europe vient de «prouver que des objectifs fiables et prévisibles, fondés sur des données scientifiques, ainsi qu’une réglementation adéquate, sont efficaces», insiste-t-elle. Reste, donc, à transformer l’essai.