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Libération
Lutte contre les pollutions

Revivez la sixième étape du Climat Libé Tour à Marseille heure par heure

En 2023, dans toute la France, «Libération» explore les enjeux de la transition écologique. Retrouvez au fil de la journée les constats et solutions déroulés par une trentaine d’intervenants lors de la sixième étape ce samedi à la Friche la Belle de Mai.
A la Friche la Belle de Mai de Marseille, ce samedi. (Olivier Monge/MYOP.Libération)
publié le 16 décembre 2023 à 12h18
(mis à jour le 16 décembre 2023 à 22h24)

A Marseille, Libé poursuit ce samedi son Climat Libé Tour, qui aborde les enjeux de la transition écologique. Avec comme fil rouge de la journée de ce samedi les pollutions, sur la mer, la terre ou dans l’air. Sur les questions des plastiques ou des mobilités, de la nuit ou des délits environnementaux, la deuxième ville la plus peuplée de France est en première ligne dans cette lutte majeure. Mais les discussions établies lors de cette sixième étape concernent la plupart des villes et territoires à travers le monde. Retrouvez toute la journée les constats et les solutions qui seront proposées par la trentaine de nos intervenants à la Friche la Belle de mai.

19 heures : Mediavivant, une enquête en spectacle

A la Friche la Belle de Mai, les goélands montent sur scène

«C’est la bande-son incontestée de Marseille. Vous l’avez sûrement croisé en venant, que ce soit en bande organisée sur le Vieux-Port ou trônant sur le couvercle d’une poubelle», sourit la journaliste de Libération Stéphanie Harounyan. En clôture de cette sixième étape du Climat Libé Tour, elle présente sur scène, avec Mediavivant, son enquête sur le goéland leucophée. «Gabian» pour les Marseillais. Oiseau aussi emblématique que mal-aimé, Marseille en accueille la plus grande population du Vieux Continent, affirme la mairie, avec 12 000 couples recensés et un envahissement progressif des villes.

«Un gabian, même en colère, c’est énormément de bluff», explique sur scène Anaël Marchas, médiateur juridique pour la Ligue de protection des oiseaux. De mars à juillet, les parents protecteurs peuvent certes se montrer agressifs mais rares sont les attaques entraînant des blessures. A Marseille, 348 interventions ont en revanche été recensées en un an suite à des nuisances sonores. Le responsable du secteur archipel du parc des Calanques Alain Mante, lui, rappelle l’intelligence des gabians : «Ils connaissent l’heure de livraison des restaurants, mais aussi les habitudes des humains en ce qui concerne les décharges.» Aucun doute pour lui : le problème ne vient pas du goéland, mais du gaspillage alimentaire.

Pour endiguer la prolifération de l’espèce en milieu urbain, Christine Juste, adjointe de la Ville à la propreté et à la biodiversité, revient sur les interventions annuelles. Retrait des nids, pose de filets et, en dernier recours, stérilisation des œufs, une pratique qui reste très réglementée avec 63 interventions en 2023. Et le public de sûrement saisir l’idée que, puisque le gabian a toujours su s’adapter à son environnement, les hommes peuvent bien en faire de même. Par Marie Vincent

18h30 : rencontre avec le journaliste Hugo Clément

«Les journalistes et les scientifiques doivent travailler ensemble»

Habitué des Climat Libé Tour, Hugo Clément, auteur de la bande dessinée le théorème du Vaquita met en avant l’importance d’une alliance entre journalistes et scientifiques afin d’éveiller les consciences au réchauffement climatique.

Mercredi, les pays présents à la COP 28 ont approuvé une décision appelant à abandonner progressivement les combustibles fossiles. Quel est votre avis sur ce texte ?

Il y a un problème de sémantique dans le texte qui a été choisi. Le fameux terme «phase out» qui signifie qu’on sortirait des énergies fossiles n’a pas été retenu. Et beaucoup de scientifiques estiment que l’expression «transitioning away» a été mal choisie car elle ne préconise pas la sortie définitive des énergies fossiles. Ce n’est pas aussi ambitieux que ça aurait pu l’être. C’est ce que disent beaucoup d’associations et d’experts présents à la COP comme Heïdi Sevestre, en qui j’ai plutôt confiance.

Quel est votre point de vue sur le traitement médiatique de l’environnement, et vers quoi faudrait-il tendre selon vous ?

Les choses s’améliorent : beaucoup plus de médias mettent en lumière les formats qui traitent de l’environnement, comme le journal météo Climat sur France 2. Mais un pan de la question écologique est complètement oublié : la biodiversité. Comme il y a du climatoscepticisme, il y a encore plus de «biodiversité scepticisme». Il faudrait que la question environnementale soit traitée dans toutes les autres thématiques, comme l’économie ou la santé.

Ces dernières années vous êtes devenu une personnalité médiatique éclipsant d’une certaine façon des scientifiques et experts. Est-ce que vous avez conscience de ces nouvelles responsabilités et comment le vivez-vous ?

Je n’ai pas pris la place de scientifique dans l’espace médiatique car ces gens-là n’en avaient pas, et n’en ont toujours que très peu. Le constat que j’ai fait c’est que malheureusement peu de scientifiques ont accès aux médias. Je pense qu’en se servant de la notoriété qu’on peut avoir en tant que journaliste, on met la lumière sur des gens qui n’en ont pas. Les journalistes et les scientifiques doivent travailler ensemble, les uns doivent alimenter les autres en information et les autres doivent alimenter les uns en médiatisation. Ça devrait être un travail d’équipe. Par Capucine Diez et Maëva Valy

16h30, bientôt la fin du plaisir ?

Alimentation et mode vertueuse, une question de volonté politique

Est-il encore possible de s’alimenter et de se vêtir sans abîmer le monde ? C’est, en substance, la question qui était posée aux invités du débat «Bientôt la fin du plaisir ?». Autour de la table, on retrouve d’abord les chefs étoilés Alexandre Mazzia et Florent Pietravalle, connus pour leur engagement local et saisonnier. Pour le premier, chef trois étoiles à Marseille, saisonnalité et équilibre alimentaire ne sont pas réservés à une clientèle privilégiée. Avec un peu de volonté politique, «tout le monde peut y avoir accès», estime-t-il. Un point de vue partagé par les autres intervenants : Olivier Lepiller, sociologue spécialiste de l’alimentation et de la santé, François Briens, ingénieur-économiste, Maroussia Rebecq, créatrice de la marque Andrea Crews et Audrey Millet, historienne de la mode. Pour cette dernière, autrice en 2021 d’un Livre noir de la mode, il est urgent de repolitiser la question du vêtement face à la surproduction et aux produits nocifs que l’on peut trouver dans des produits bas de gamme, fabriqués «par des esclaves» au bout de la terre. La spécialiste critique aussi l’obsolescence programmée que l’on appelle «mode» et qui veut qu’un vêtement soit bon à jeter car dépassé. «En fait, la mode, c’est pas super intéressant, dit-elle. Ce qui compte, c’est de se sentir bien quand on enfile son jean le matin. Pas autre chose.» Répondant ainsi à la problématique posée par le débat : oui, il semble encore possible de prendre du plaisir en mangeant ou en s’habillant sans détruire la planète. Par Jean-Baptiste Chabran.

15h30, silence… et sauvons la nuit

«On n’est pas tous égaux face au bruit»

Jérôme Sueur est écologue, acousticien et maître de conférences. Il participait ce samedi au débat «sauver la nuit» lors du Climat Libé Tour à Marseille. Interview.

14 heures, comment sanctionner les délits à la nature et mieux protéger les espaces

Pour lutter contre les atteintes à la nature, «les normes sont bien faites, jusqu’à ce que l’on y déroge»

Si l’on veut régler la question des pollutions, celle des sanctions contre les atteintes est primordiale. «En France, on constate qu’il n’y a pas de culture de la sévérité contre les crimes et délits vis-à-vis de la nature, qui sont considérés comme moins graves que les atteintes aux biens des personnes», analyse d’emblée Marine Calmet, juriste spécialisée dans les droits de la nature, permettant de fixer le nœud du problème abordé lors du premier débat de l’après-midi du Climat Libé Tour ce samedi 12 décembre. Et d’ajouter : «Les normes sont bien faites, jusqu’à ce que l’on y déroge.» Retrouvez notre compte-rendu.

Interview de Marine Calmet : «Notre liberté d’entreprendre s’arrête là où la liberté de la nature commence»

A l’heure où la protection de la biodiversité demeure essentielle pour notre santé comme pour la lutte contre le réchauffement climatique, comment s’assurer de préserver au mieux notre nature et les espèces qui l’habitent ? Rencontre avec l’avocate et juriste en droit de l’environnement Marine Calmet, qui a travaillé sur de nombreux procès et particulièrement sur celui de «Montagne d’or» en Guyane. Notre interview.

12 heures, comment protéger les plus vulnérables

Des pollutions «la plupart du temps invisibles ou trop peu médiatisées»

«On ne peut pas dissocier la santé humaine des dégâts environnementaux.» Daniel Bley, anthropologue biologiste, résume le deuxième débat du jour mêlant santé et environnement, portant aussi sur la manière dont on peut – et doit – protéger les plus vulnérables. Alimentation, pollutions, impact du genre… Les intervenants ont déployé de nombreux sujets au carrefour des deux thèmes. Et l’autrice et militante féministe Camille Aumont Carnel de résumer ce qui est le plus important à ses yeux : «Les solutions utiles aux plus vulnérables, pas à tout le monde.»

Vice-président de l’association Cap au Nord, Jean-Pierre Lapebie revient de son côté sur les pollutions spécifiques à Marseille : les particules fines dans l’Estaque et à la Joliette, le bruit des avions dans les 15e et 16e arrondissements, les polluants dans l’eau potable des Quartiers Nord… Des pollutions «qui sont la plupart du temps invisibles ou trop peu médiatisées», regrette-t-il.

Michèle Rubirola, première adjointe au maire de Marseille, revient, elle, sur l’action de la ville passée à gauche en 2020 : sa politique en matière d’alimentation bio, la tribune de 25 maires de villes situées sur le littoral méditerranéen, à l’appel du maire de Marseille, Benoît Payan, pour lutter contre la pollution de l’air des navires… Mais elle renvoie la balle à la métropole, dirigée par la droite de Martine Vassal, sur l’épineuse question des déchets.

Mais en dehors des actions territorialisées survient la nécessaire question du global. «Qu’est-ce qu’on fait pour obliger ceux qui polluent à changer ? demande l’autrice Camille Aumont Carnel. On n’adresse pas suffisamment le message aux personnes responsables de la pollution et des problèmes à l’environnement.» Comme pour répondre à sa propre question, la militante féministe appelle à plusieurs reprises à la «révolution». Par Damien Dole.

Lutte contre les pollutions : «On est souvent mieux reçus par les plus précaires que par la population des supermarchés bio»

Plages, nappes phréatiques, bruit des voitures ou des avions… A Marseille, le sujet des pollutions revient à intervalles réguliers. Il y a une trentaine d’années, l’association Cap au Nord, est créée afin de défendre le cadre de vie et l’environnement des 15e et 16e arrondissements de la ville. Invité au Climat Libé Tour ce samedi, son vice-président, Jean-Pierre Lapebie, documente ces sujets pour alerter et lutter sur le terrain, dans les Quartiers Nord et plus largement. Pour Libération, il revient sur les différentes formes de pollution qui frappent Marseille et sa population. Retrouvez son interview.

10h30, «Plastique, comment stopper l’hémorragie»

Bientôt, un océan de plastique ?

La question qui lance le premier débat du Climat Libé Tour, à Marseille ce samedi, plombe directement l’ambiance. «Se baignera-t-on bientôt dans une mer de plastique et plus une mer de poissons ?» Pour l’océanographe Richard Sempéré, directeur de l’Institut des sciences de l’océan d’Aix-Marseille Université, la réponse est «oui, d’ici un siècle», si l’homme continue sur sa lancée. Aujourd’hui, l’humanité produit 500 millions de tonnes de plastique chaque année. Alors qu’il faudrait dès maintenant réduire ce chiffre, des projections estiment que l’industrie du plastique dépassera les 600 millions de tonnes produites d’ici 2030. Compte rendu.

Les tortues marines de Tahiti, victimes de la pollution des océans au plastique

Cécile Gaspar, fondatrice et directrice de conservation de l’association tahitienne Te Mana O Te Moana, était présente ce matin à Marseille à travers une courte vidéo diffusée durant le débat «Plastique, comment stopper l’hémorragie», pour alerter sur la dégradation des écosystèmes marins.

Les tortues marines sont un des symboles des conséquences de cette pollution sur l’environnement. Pour ces reptiles marins, les effets directs les plus connus sont l’ingurgitation de plastiques provoquant des occlusions souvent létales ou l’enchevêtrement dans des filets allant jusqu’à l’étouffement. Des effets plus pervers car invisibles sont les micro et nanoplastiques ingérés par les animaux. Enfin, la présence de plastiques dans le sable tend à augmenter la température des nids, ce qui peut tuer les jeunes tortues dans l’œuf, ou produire des portées uniquement féminines. Par Maëva Valy.

Julie Gautier, apnéiste : «Peu importe que ce soit trop tard ou non, l’important c’est de faire ce qui est juste»

Pour saisir la pollution des mers par le plastique, il y a les chiffres qui effraient. L’ex-apnéiste professionnelle Julie Gautier a choisi l’art. Aux premières loges par sa pratique de la mer, elle a réalisé un court métrage, Bakélite, nom de l’un des premiers plastiques créés au début du XXe siècle. «Cela a d’abord été l’amour profond avec cette matière. On diabolise d’ailleurs le plastique, mais c’est une matière extraordinaire», explique Julie Gautier. Le souci à ses yeux, c’est qu’«on s’en sert beaucoup trop dans notre quotidien».

Sous l’eau, les apnéistes ou les plongeurs sont aux premières loges de ce rouleau compresseur, avec des bouteilles, des sacs ou encore des bouts de vêtements. «Le problème, c’est surtout la pollution qu’on ne voit pas, or c’est la plus grande partie», rappelle-t-elle, afin de sensibiliser à la nocivité des microplastiques.

Dans son court métrage, on voit Julie Gautier en apnée marcher autour de déchets plastiques sur le sable, danser avec un monstre de plastique, l’affronter, le terrasser, avant que les poissons ne reviennent s’ébrouer. Elle explique avoir voulu «rendre la chose belle, toucher au cœur afin d’aider à assimiler toutes les informations. L’intérêt de l’art est là, adoucir, et c’est complémentaire des travaux scientifiques ou politiques». «L’apnée, je l’ai utilisée pour transmettre les émotions que j’avais dans l’eau. Je touche des gens qui ne sont pas forcément concernés par la cause des pollutions plastiques», poursuit-elle. Avant de conclure : «J’étais éco-anxieuse, mais cela ne fait rien avancer. Donc peu importe que ce soit trop tard ou non, l’important c’est de faire ce qui est juste.» Par Damien Dole.