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Libération
Ironie

COP28 : le nombre de lobbyistes des énergies fossiles présents au sommet bat un nouveau record

Plus de 2 500 lobbyistes des énergies fossiles ont obtenu une accréditation pour la COP28 de Dubaï, dénonce ce mardi 5 décembre une coalition d’ONG. Leur présence surpasse en nombre les délégations des dix pays les plus vulnérables au changement climatique.
Un panda faisant la promo de l'entreprise chinoise SinoCarbon Innovation & Investment à la COP28, dimanche. (Rafiq Maqbool/AP)
publié le 5 décembre 2023 à 10h10

Si les lobbyistes des énergies fossiles représentaient un pays lors de la COP28 de Dubaï, il s’agirait de la troisième plus grosse délégation. Leur groupe serait seulement dépassé par le Brésil et ses plus de 3 000 délégués ; ainsi que les Emirats (4 500 délégués et 4 900 invités). C’est ce triste record que révèle ce mardi 5 décembre la coalition d’ONG Kick Big Polluters Out (KBPO), dont font partie Global Witness, Greenpeace, ActionAid et Transparency International.

2 456 lobbyistes des énergies fossiles ont ainsi obtenu une accréditation pour participer à cette 28e conférence de l’ONU sur le climat, soit loin devant les 1 509 personnes représentant les délégations des dix pays «les plus vulnérables au changement climatique» comme la Somalie, les Iles Salomon ou encore le Soudan. Un nombre également sept fois plus important que les représentants des populations autochtones. Ce décalage illustre «à quel point la présence de l’industrie éclipse celle de ceux qui sont en première ligne de la crise», dénonce la coalition.

En 2022, l’analyse de KBPO avait montré qu’au moins 636 lobbyistes des combustibles fossiles avaient eu accès aux négociations sur le climat de la COP27 en Egypte. Soit près de 4 fois moins qu’aujourd’hui. En 2021, 503 lobbyistes étaient pour leur part présents à la COP26 à Glasgow. «La COP ne doit pas devenir le salon de rencontres mondiales des lobbyistes fossiles», met en garde Gaïa Febvre, responsable des politiques internationales au Réseau Action Climat.

«La COP28 est dans un brouillard de déni climatique»

Pour la première année, grâce à la pression de la société civile, les 88 000 participants de cette plus importante réunion du climat devaient renseigner leur employeur et la relation, financière ou non, avec l’entité demandant une accréditation en leur nom. Le groupement d’ONG s’est donc appuyé sur cette liste des participants publiée par l’ONU pour étayer son analyse. Un chiffre que KBPO considère cependant comme sous-estimé, puisqu’il se fonde uniquement sur des données publiques et exclut les lobbyistes d’autres secteurs polluants, comme la finance ou l’agroalimentaire, et dénombre seulement «tout individu qui peut raisonnablement avoir pour objectif d’influencer» la COP28 «dans l’intérêt des entreprises fossiles et de leurs actionnaires» comme un lobbyiste.

Parmi les lobbyistes des énergies fossiles accrédités pour ces grands raouts où le futur de la planète est décidé, la France a par exemple choisi Patrick Pouyanné, PDG de TotalEnergies. L’Italie a, elle, emmené des cadres d’Eni, et l’Union européenne des employés de BP, Eni et ExxonMobil. Les organisations professionnelles ayant le statut d’observateur à la COP ont aussi amené leur contingent d’employés de Shell, TotalEnergies ou Equinor, alors que la sortie des énergies fossiles comme le pétrole, le gaz et le charbon est au cœur du bras de fer de cette COP28.

«Croyez-vous vraiment que Shell, Chevron ou ExxonMobil envoient des lobbyistes pour observer passivement les discussions ?» s’interroge Alexia Leclercq, cofondatrice de Start : Empowerment, citée par KBPO dans son communiqué. «Ils sont la raison pour laquelle la COP28 est dans un brouillard de déni climatique et pas dans la réalité.» Et des procès en hypocrisie du théâtre que représente à ce jour ce sommet.