De nouvelles pompes à pétrole pourraient bientôt faire leur apparition entre les arbres de la forêt de La Teste-de-Buch en Gironde. La société canadienne Vermilion a en effet de reçu lundi 20 novembre un avis favorable de la commissaire chargée de l’enquête publique, Carole Ancla, pour réaliser huit nouveaux forages pétroliers sur la commune. Vermilion prévoit de creuser ces nouveaux puits sur la concession de Cazaux, qui s’étend sur plus de 50 km², et où une cinquantaine de puits sont déjà en activité, pour «atteindre des réserves pétrolières jusque-là non exploitées afin de stabiliser la production et de viser à l’atteinte du rendement maximum du gisement imposé par le Code minier» sur le site. Ces travaux sont prévus pour durer une dizaine d’années.
La production est actuellement estimée à 1 500 barils par jour, soit 200 mètres cubes quotidiens. Le groupe Vermilion, premier producteur de pétrole en France avec 130 salariés, est titulaire jusqu’au 1er janvier 2035 de cette concession exploitée depuis les années 1960. Sous condition d’un arrêté de la préfecture de Gironde en son sens, ce projet pourrait donc bientôt sortir de terre, alors qu’une loi française prévoit l’arrêt progressif de l’exploitation des hydrocarbures dans le sol en France d’ici 2040. Cette loi sur les hydrocarbures, portée par Nicolas Hulot en 2017, permet cependant de continuer la recherche et l’exploitation des puits sous conditions, dans le cadre de permis délivrés avant le 1er janvier 2018, et seulement jusqu’en 2040.
Interview
À l’issue de l’enquête publique menée du 28 août au 26 septembre, la commissaire enquêtrice a reçu 102 contributions, «reflet des inquiétudes légitimes du public face aux grands enjeux liés aux émissions de gaz à effet de serre et au réchauffement climatique», peut-on lire dans son rapport accessible en ligne. Les termes d’ «abomination environnementale» ou de «parodie écologique» ont été utilisés par certains riverains inquiets de ces nouveaux forages, rapporte Le Figaro.
Des forages contestés par les écologistes, mais justifiés par l’enquête publique
Si Carole Ancla reconnaît des «inquiétudes certainement exacerbées» à la suite des incendies monstres de 2022 qui ont ravagé 7 000 hectares de la forêt de La Teste-de-Buch, la commissaire relève, pour justifier son avis favorable, que presque «aucun riverain ne s’est manifesté pour émettre des remarques quant aux nuisances et pollutions susceptibles d’être engendrées par les travaux de forages ou encore par l’activité actuelle de la concession de Cazaux». La commissaire estime aussi que «les forages pétroliers en exploitation pour la plupart depuis les années 1960 n’ont pas empêché le classement de la forêt de La Teste en site Natura 2000, ni le développement touristique du bassin d’Arcachon», et que «l’activité pétrolière en France est strictement réglementée et contrôlée par les services de l’État».
La commissaire enquêtrice affirme enfin avoir fait «abstraction des considérations générales sur le devenir de l’extraction pétrolière en France» au-delà de 2040, et assure que «le pétrole qui ne serait pas produit en France serait certainement importé avec un coût environnemental bien plus élevé». Il conviendrait selon elle «d’assumer le risque industriel lié à nos propres consommations d’énergie plutôt que de l’externaliser sur d’autres territoires».
«Cet argument qui consiste à dire qu’on va faire des circuits courts du pétrole pour moins polluer, je trouve ça d’un cynisme incroyable», rétorque Vital Baude, conseiller régional Europe Ecologie-Les Verts (EE-LV), cité par Le Figaro. L’élu se dit «navré, atterré» par l’avis rendu par la commissaire enquêtrice et déplore l’objectif d’aller «chercher les dernières gouttes de pétrole dans le sous-sol». Pour lui, il est particulièrement symbolique que cet avis favorable soit rendu alors que l’observatoire européen Copernicus vient de faire état, pour la première fois, d’un dépassement de plus de 2 °C sur une journée de la température moyenne mondiale par rapport à l’ère préindustrielle.
Le dossier de Vermilion est désormais soumis à la décision du préfet de la Gironde, qui doit se positionner pour suivre ou non l’avis favorable rendu par la commissaire enquêtrice. Le sous-sol girondin reste suspendu à cette décision, en attendant d’être définitivement libre de toute exploitation d’hydrocarbures en 2040.