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Libération
Dérèglement climatique

Inondations : ce que l’on sait de la tempête Daniel, qui a frappé le bassin méditerranéen de la Grèce à la Libye

Les pluies diluviennes qui se sont abattues ces derniers jours sur plusieurs pays du bassin méditerranéen ont causé des dégâts considérables et un nombre de morts encore incertain.
A Farkadona, près de Karditsa, dans le centre de la Grèce, le 7 septembre. Quinze personnes sont mortes dans le pays. (Will Vassilopoulos/AFP)
publié le 12 septembre 2023 à 16h50

Cela fait près d’une semaine que la tempête Daniel dévaste l’est du bassin méditerranéen. Un phénomène d’une telle intensité que des météorologues l’ont qualifiée de «medicane», contraction d’ouragan («hurricane») et de Méditerranée. De la Grèce à la Libye, en passant par la Turquie et la Bulgarie, le phénomène météorologique a déjà provoqué la mort de milliers de personnes.

Le réchauffement de la planète est une nouvelle fois désigné coupable. Si les inondations ne sont pas apparues avec le dérèglement climatique, chaque degré supplémentaire accroît la quantité de vapeur d’eau dans l’atmosphère, augmentant d’autant les risques d’épisodes de fortes précipitations. Et même si ces tempêtes en Méditerranée sont d’intensité bien moindre que leurs cousines de l’Atlantique ou de l’océan Indien, elles peuvent provoquer des catastrophes d’ampleur lorsqu’elles frappent des zones sensibles. On fait le point sur les pays concernés.

La Grèce passe du feu aux pluies

La tempête Daniel a frappé à partir du lundi 4 septembre la Magnésie. Pour cette seule région du centre de la Grèce, entre 600 et 800 mm de pluies sont tombés en vingt-quatre heures. Selon la société d’analyse de data américaine Knoema, la Grèce tout entière reçoit en moyenne 650 mm de pluie par an.

Le bilan est très lourd : quinze morts d’après les derniers chiffres dimanche et deux personnes restent portées disparues selon la protection civile. Le pays vit un été tragique : ces intempéries succèdent à des incendies de forêt dévastateurs, qui ont fait au moins 26 morts, près de 4 500 personnes évacuées et 70 000 hectares de terres submergées. Une bombe à retardement car la région de Thessalie, dans laquelle se trouve la Magnésie, réunit 12 % des terres cultivées de la Grèce.

Le chef du gouvernement du pays, Kyriákos Mitsotákis, doit rencontrer ce mardi à Strasbourg la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, pour parler de la tragédie climatique. Le désastre a mis le pays à l’arrêt, à tel point qu’une rencontre très importante du point de vue diplomatique prévue le 18 septembre à New York entre le Premier ministre grec et le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a été reportée.

En Turquie, des vacanciers en forêt emportés par les pluies

Les pluies diluviennes ont touché pratiquement au même moment la Turquie. Le nord-ouest du pays, en particulier la province de Kirklareli, limitrophe de la Bulgarie, a été la région la plus touchée mardi 5 septembre. Selon un nouveau bilan donné le 7 septembre par des autorités, les intempéries ont fait au moins 8 morts.

Six victimes dans la province de Kirklareli étaient en vacances dans la zone et se trouvaient dans des maisonnettes en bois bâties sans permis, au milieu des bois, lorsque les pluies torrentielles se sont abattues sur la région. Une enquête a été ouverte et un mandat d’arrêt a été émis contre le propriétaire de société de tourisme. Les deux autres victimes ont trouvé la mort à Istanbul, la plus grande ville du pays, dont certaines rues ont été transformées en torrents.

En Bulgarie, le littoral de la mer Noire touché

Un peu plus au nord, la tempête a provoqué des inondations sur le littoral de la mer Noire. Et le bilan est là aussi mortel : après que les corps de deux personnes portées disparues ont été retrouvés en mer mercredi 6 septembre, le bilan est désormais de quatre morts en Bulgarie.

La station balnéaire de Tsarevo a été particulièrement touchée, les autorités ayant déclaré l’état d’urgence, après que des ponts ont notamment été détruits. La ministre du Tourisme, Zaritsa Dinkova, a estimé qu’environ 4 000 personnes ont été touchées par la catastrophe sur toute la partie sud de la côte bulgare.

En Libye, la rupture de deux barrages sème le chaos

En traversant la Méditerranée, la tempête Daniel est devenue un «medicane». Et c’est là qu’il est, de très loin, le plus meurtrier. Plusieurs villes et villages de l’est de la Libye ont été touchés dimanche 10 septembre, notamment Benghazi, Al Bayda ou encore Battah.

Mais c’est à Derna que la tragédie semble la plus importante. Les pluies ont été si intenses qu’un premier barrage puis un second ont cédé, faisant déferler un mur d’eau sur la ville de quelque 100 000 habitants.

Selon l’institut de météo allemand Deutscher Wetterdienst, il tombe habituellement 4 petits millimètres de pluie à Derna pendant tout le mois de septembre en moyenne. Mais le Centre météorologique national de Libye a déclaré que le niveau des pluies torrentielles était compris entre 150 et 240 mm avec un record à Al Bayda, qui a enregistré un taux de précipitations quotidien de 414,1 mm.

Le bilan matériel mais surtout humain sera vraisemblablement désastreux. Les autorités locales parlent ce mardi de 2 300 morts et le Croissant Rouge de 10 000 disparus. «Je reviens de Derna, c’est désastreux, a déclaré à Reuters Hichem Abou Chkiouat, ministre de l’Aviation civile. Les corps gisent partout, dans la mer, dans les vallées, sous les bâtiments. Je n’exagère pas lorsque je dis que 25 % de la ville a disparu.»