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Libération
Reportage

Inondations dans le Pas-de-Calais : «On ne peut plus vivre dans des conditions pareilles»

A Blendecques, la rivière Aa a quitté son lit et les eaux menacent de nombreuses habitations. Sur place, les habitants sont épuisés.
Les pompiers du Pas-de-Calais à pied d'œuvre dans les rues de Blendecques, mercredi 3 janvier. (Stephane Dubromel/Hans Lucas pour Liberation)
par Sascha Garcia, envoyé spécial à Blendecques (Pas-de-Calais)
publié le 3 janvier 2024 à 10h44
(mis à jour le 3 janvier 2024 à 14h44)

La rivière a débordé beaucoup plus vite que prévu. A Blendecques, dans le Pas-de-Calais, les habitants du quartier Mont-Sarah se sont réveillés en pleine nuit, obligés de fuir l’eau qui s’engouffrait dans leur maison. Emmitouflée dans sa grosse doudoune blanche, Pascaline raconte mercredi 3 janvier qu’elle n’a jamais vu ça depuis qu’elle s’est installée là, il y a quinze ans. Pas même lors des graves inondations de novembre. «C’est pire que la dernière fois», laisse échapper la jeune femme.

Le département a été placé en vigilance rouge mardi après-midi, et le cours d’eau Aa dans la nuit de mardi à mercredi. Entre 7 et 15 mm de précipitations sont tombés, selon Météo France.

Les hôtels ne sont pas encore ouverts et aucun local n’a pour l’instant été mis à disposition des sinistrés. La Croix-Rouge prévoit de déplacer dans la journée son centre d’hébergement vers une salle de sport, afin de pouvoir accueillir jusqu’à 100 sinistrés. Elle a également fait parvenir des lits à Quernes, où la mairie s’est occupée d’héberger une famille de six personnes pour la nuit, et à Arques, où ils n’ont pas encore servi.

En attendant, Pascaline s’est réfugiée quelques maisons plus loin. Avec d’autres habitants, ça discute devant le garage d’une voisine et le mécontentement règne. Une élue de la mairie de Blendecques est présente et essuie les reproches de ceux qui estiment que rien n’a été fait pour empêcher que les inondations se reproduisent depuis novembre.

Elodie ne partira pas, quitte à rester à l’étage de sa maison avec ses 2 chiens et 5 chats : «Je reste avec mes animaux.» En novembre, l’eau s’était arrêtée au palier de sa porte mais la trentenaire redoute aujourd’hui qu’elle franchisse le seuil. «On est dépités. En novembre, on est passés à côté, mais cette fois on a vraiment peur», dit Elodie en caressant son golden retriever d’une main, comme pour se rassurer. Et d’ajouter : «Si ça continue comme ça, oui un jour, on partira.»

Bottes aux pieds, Laurent émerge de sa maison. La voiture familiale est chargée de valises, son épouse attend à l’avant : le couple va se réfugier chez leur fils à Delettes, à 12 kilomètres. «Là-bas, ils sont dans l’eau aussi, mais pas mon fiston», tente de se rassurer le quinquagénaire.

Avant de partir, ils ont mis tous ses meubles en hauteur afin de les protéger de l’eau. La famille de Laurent vit dans le quartier depuis plus de trente ans et a connu les inondations de 2002 puis de novembre 2023. «Cette fois, on ne va pas y échapper», lance-t-il avant de monter dans sa voiture, les roues déjà dans l’eau.

Le ras-le-bol est présent sur toutes les lèvres à Blendecques. «On ne peut plus vivre dans des conditions pareilles. On commençait à remonter la pente, reprend Pascaline. Une fois ça passe, mais pas deux.» Depuis les inondations de novembre, elle vivait à l’étage de sa maison, le rez-de-chaussée étant toujours humide. «Finalement, heureusement qu’on n’a rien remis dans la maison, la preuve !»