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Climat

La baisse des émissions de gaz à effet de serre de la France s’est essoufflée en 2024

Les émissions de gaz à effet de serre de la France ont baissé de 1,8 % en 2024, un recul moins important qu’entre 2022 et 2023, annonce ce vendredi 28 mars l’organisme chargé par l’Etat de calculer les émissions nationales. Ce qui ne met pas le pays sur de bons rails pour respecter son objectif climatique à horizon 2030.
C'est dans le secteur de l'énergie que la baisse des émissions est la plus importante. Dans l'industrie, les transports ou le bâtiment, elle est plus faible. (Emeric Fohlen/Hans Lucas)
publié le 28 mars 2025 à 8h00

Une bonne dynamique déjà enrayée. En France, après une réduction record et remarquée en 2023 de 5,8 % des émissions brutes de gaz à effet de serre (c’est-à-dire qui ne tiennent pas compte de la quantité de carbone absorbée naturellement par les forêts et les sols), le rythme marque le pas. Selon les chiffres provisoires publiés ce vendredi 28 mars par le Centre interprofessionnel technique d’études de la pollution atmosphérique (Citepa), l’organisme mandaté par l’Etat pour réaliser ces estimations, l’année 2024 a enregistré une baisse de 1,8 % de ces émissions par rapport à 2023. La dynamique est donc toujours à la diminution, mais il s’agit de la plus faible en trois ans – 2022 s’étant achevé sur un recul de 2,7 % des émissions.

Baisse marquée dans l’énergie

Au total, l’année dernière, 366 millions de tonnes équivalent CO2 (Mt CO2e) ont été émises sur le territoire français par les activités humaines, soit 7 Mt CO2e de moins qu’en 2023. Les secteurs des transports, de l’industrie, de l’énergie et du résidentiel-tertiaire ont tous terminé l’année à la baisse. C’est dans celui de l’énergie qu’elle est la plus marquée (-11,6 % par rapport à 2023), en raison essentiellement de la poursuite du «redressement de la production nucléaire» (à l’arrêt pour maintenance ou problèmes de corrosion, de nombreux réacteurs ont repris leur activité à partir de 2022) et d’une «forte production hydraulique», précise le Citepa.

Pour le reste, le recul des émissions de gaz à effet de serre est beaucoup moins important, qu’il s’agisse des émissions des activités industrielles (-1,8 %), des bâtiments (-1,1 %) ou des transports (-0,7 %). Le Citepa relie cette «légère évolution» à la baisse dans les transports à la «diminution des ventes de carburant de 0,5 % entre 2023 et 2024», mais souligne que ce secteur, premier émetteur de gaz à effet de serre en France, doit faire bien mieux pour atteindre les objectifs.

Dans l’industrie, la réduction a été principalement liée aux baisses enregistrées dans les filières des ressources minérales et des matériaux de construction, ce «qui peut s’expliquer notamment par des baisses de la production industrielle du ciment et du verre creux», expose le Citepa. S’agissant du secteur résidentiel-tertiaire, l’organisme note que «l’infléchissement» est resté très limité en raison de la baisse drastique (- 40 %) du nombre de rénovations énergétiques des bâtiments entre 2023 et 2024 – pour rappel, le budget de MaPrimeRénov’, principale aide publique à la rénovation énergétique des logements, a été raboté plusieurs fois par le gouvernement l’an passé, faisant craindre des répercussions sur plusieurs mois encore.

Le compte n’y est pas

Avec une baisse générale de 1,8 %, le compte n’y est pas pour espérer pouvoir respecter l’objectif climatique du pays à horizon 2030. Car d’ici cinq ans, la France s’est engagée à réduire ses émissions brutes de 50 % par rapport à 1990. Le gouvernement, très en retard, ne s’est toujours pas encore doté officiellement de sa SNBC-3 (la troisième Stratégie nationale bas carbone, une ligne conductrice permettant de dessiner un cap clair et se donner les moyens d’atteindre l’objectif), mais le Citepa rappelle dans son analyse que pour tenir la bonne trajectoire, le pays doit émettre en moyenne, annuellement, 333 Mt CO2e.

«Une nouvelle accélération forte de la baisse des émissions est attendue [ces prochaines années] afin de pouvoir atteindre le palier envisagé dans la proposition de la SNBC-3», met en garde l’organisme dans son document. En juin dernier, dans son rapport annuel, le Haut Conseil pour le climat, conscient du chemin restant à parcourir, avait précisément appelé l’exécutif à ne pas relâcher ses efforts après une année 2023 exceptionnelle. «Il est indispensable de tenir le cap de la décarbonation dans la durée», avait écrit cette autorité indépendante.