La Martinique ne voit plus rouge. Après avoir privé d’électricité 25 000 foyers et provoqué le naufrage d’un catamaran au sud-est des côtes de l’île française, la forte tempête tropicale Bret s’est progressivement affaiblie ce vendredi 23 juin, s’éloignant en direction de la mer des Caraïbes. L’île, qui faisait toujours face à des vents de 90 km/h vendredi, est repassée en vigilance orange même si de fortes pluies étaient encore attendues. Selon Eva Merceron, responsable adjointe du service de prévision de Météo-France Martinique, les températures exceptionnellement élevées enregistrées en ce moment dans l’océan Atlantique sont directement liées à la formation de ce système cyclonique.
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La canicule marine qui embrase l’Atlantique a-t-elle renforcé la tempête Bret ?
La vague de chaleur a tout simplement permis à Bret d’exister. Le principal carburant d’un cyclone est la chaleur océanique. Concrètement, l’océan doit atteindre une certaine température pour que l’humidité marine puisse alimenter le système cyclonique. Et, plus il chauffe, plus le système a du combustible pour fonctionner. D’autres paramètres entrent bien sûr en compte, comme la vitesse ou la direction des vents. Mais si la température océanique n’est pas suffisamment élevée, le phénomène ne se produit pas. Or ces derniers jours, des anomalies de températures de l’océan de 1,2 voire 1,5 °C ont été atteintes près de la Martinique, ce qui a permis à la tempête Bret d’évoluer en un système cyclonique.
Est-il surprenant d’observer un système cyclonique aussi tôt dans l’année dans cette zone ?
Ce n’est pas impossible, d’ailleurs c’est déjà arrivé. En revanche, ce qui est vraiment inhabituel c’est la survenue concomitante, dès le mois de juin dans la zone des petites Antilles, de deux tempêtes tropicales dotées d’un prénom, c’est-à-dire suffisamment fortes pour être baptisées par les scientifiques. La deuxième, Cindy, ne menace pas directement l’arc antillais. Elle doit passer plus au large, occasionner un peu de houle, sans avoir un impact comparable à celui de Bret. Habituellement, à cette période de l’année, la mer commence à devenir plus chaude mais elle ne l’est pas suffisamment pour faire naître des cyclones. Ce genre de configuration se produit plutôt au mois de septembre.
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Y a-t-il forcément plus de cyclones lors de canicules marines ?
Tout dépend de la configuration particulière du cisaillement du vent [variation de la vitesse ou de la direction du vent entre deux points proches dans l’atmosphère, ndlr]. Si celle-ci est favorable au développement d’un phénomène cyclonique, le mélange avec la hausse des températures peut s’avérer catastrophique. En revanche, si elle est défavorable, les effets s’annulent en quelque sorte. C’est la situation qui prévaut actuellement dans les Antilles et c’est la raison pour laquelle la tempête Bret ne s’est pas transformée en ouragan.
Comment s’annonce la saison cyclonique dans les Caraïbes ?
On s’attend à une saison normale à cause de l’effet de frein des vents provoqué par El Niño.
Concrètement, quel impact devrait avoir ce phénomène météorologique naturel et saisonnier ?
El Niño engendre un réchauffement des eaux du côté de l’océan Pacifique. En revanche, dans notre zone, en plein océan Atlantique, ce phénomène donne naissance à des vents défavorables à l’activité cyclonique, contrairement à d’autres parties du monde où c’est l’inverse. Pour l’instant, on les observe seulement à très haute altitude. Ils devraient se renforcer au cours des prochaines semaines voire des prochains mois.