Des responsables politiques du camp modéré s’attaquent de plus en plus souvent aux politiques climatiques de l’Union européenne, en adoptant les arguments de l’extrême droite, s’inquiète le commissaire à l’Environnement, le Lituanien Virginijus Sinkevičius, dans une interview publiée dimanche par le média Politico. Il estime que c’est là le «plus grand danger» pour l’UE et ses efforts en faveur de l’environnement alors que les élections européennes doivent se tenir en juin 2024. «Je vois que certains partis traditionnels pourraient être enclins à légitimer ces attaques contre le Green Deal [le Pacte vert ndlr]. C’est le plus grand danger que je vois», a-t-il expliqué en marge de la COP 28, qui se tient à Dubaï jusqu’au 12 décembre.
Virginijus Sinkevičius, considéré comme proche des Verts, ne précise pas à quels partis il faisait référence. Vague, il juge tout de même que les groupes qu’il vise utilisent des arguments «qui méritent peut-être d’être des mèmes sur Internet, plutôt que d’être sérieusement discutés». Cette année, le Parti populaire européen (droite et centre droit) s’est battu avec acharnement contre un projet de texte sur la restauration de la nature, qui vise à réparer les zones abîmées du Vieux Continent. Une campagne truffée de fausses informations que le programme des Nations unies pour l’environnement a d’ailleurs vivement critiquée.
Passer toute la législation climatique au «broyeur»
«Regardez le parti populiste aux Pays-Bas, ils ont toujours obtenu environ 17 sièges, donc ce n’est pas complètement sorti de nulle part, mais à partir du moment où les partis traditionnels commencent à faire valoir les mêmes arguments, c’est là que nous courons un véritable danger, non seulement pour le Green Deal européen mais pour le projet européen dans son ensemble», s’alarme Virginijus Sinkevičius.
Le Parti de la liberté d’extrême droite néerlandais (PVV) – qui a annoncé vouloir passer toute la législation climatique au «broyeur» – a remporté les élections législatives avec 37 sièges à la fin du mois de novembre, (contre 17 sièges en 2021). Peu avant cette victoire, les centristes du pays avaient affirmé qu’ils pourraient travailler avec le parti d’extrême droite, longtemps boudé par les politiciens traditionnels.
Analyse
Pour Virginijus Sinkevičius, la dynamique des élections européennes de 2024 sera très différente de celle de 2019. «En 2019, nous avons vu les partis traditionnels être très verts» à la suite de manifestations climatiques à grande échelle à travers le monde. «Cela a ouvert une fenêtre pour le Green Deal européen, puis nous avons eu la victoire du président Biden, la première chose qu’il a faite, c’est de revenir à l’accord de Paris», que son prédécesseur Donald Trump avait quitté, rappelle le commissaire à l’environnement.
Aujourd’hui, «les temps ont considérablement changé. Nous sommes confrontés à une plus grande incertitude, à une pression accrue sur les prix à la consommation… et sans parler de la guerre», explique-t-il, en faisant référence à l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Il ne semble toutefois pas croire à un possible retour en arrière des politiques environnementales européennes. «Ce serait une grave erreur […] Nous n’aurions pas l’air sérieux devant nos partenaires.»