Les engagements pourront-ils être tenus ? Un rapport de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) publié ce mardi 4 juin met en évidence le long chemin à parcourir pour tripler les capacités mondiales d’énergie renouvelable d’ici 2030, conformément aux promesses énoncées en ce sens lors de la COP28 de Dubaï, en décembre 2023. Lors de ce sommet international pour le climat, près de 200 pays ont juré de faire mieux en matière d’énergie afin de limiter le réchauffement mondial à 1,5 °C, soit l’objectif le plus ambitieux de l’accord de Paris. Pour la première fois, les gouvernements ont formulé des mesures clés pour effectuer une «transition juste, ordonnée et équitable hors des combustibles fossiles». Le monde s’est ainsi accordé pour améliorer l’efficacité énergétique, réduire considérablement les émissions de méthane et surtout, tripler les capacités d’énergie renouvelable d’ici 2030.
Analysant les politiques énergétiques de 150 pays, ce nouveau rapport révèle que les ambitions et les plans de mise en œuvre mondiaux ne sont pas encore conformes à cet objectif. Selon l’AIE, qui fait référence en la matière, le triplement du renouvelable est certes «ambitieux mais réalisable», «compte tenu du déploiement annuel record, de la dynamique remarquable du secteur et de la compétitivité croissante par rapport aux combustibles fossiles - en particulier pour le solaire photovoltaïque et l’éolien».
11 000 GW nécessaires
Toutefois, très peu de pays ont explicitement établi des objectifs en ce sens dans leurs contributions déterminées au niveau national (CDN), c’est-à-dire le plan d’action que chaque gouvernement est sommé d’établir par l’accord de Paris pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre. «Les engagements officiels s’élèvent actuellement à 1 300 gigawatts (GW), soit seulement 12 % de ce qui est nécessaire pour atteindre l’objectif mondial de triplement fixé à Dubaï», note l’AIE. En effet, le monde doit déployer 11 000 GW pour atteindre sa cible.
En clair, les pays doivent impérativement inclure toutes leurs politiques, plans et estimations existants dans leurs nouvelles CDN attendues en 2025 pour espérer atteindre 8 000 GW de capacités, soit 70 % de l’objectif, plaide l’AIE. Afin que les promesses se transforment «rapidement» en «plans d’action», résume Fatih Birol, le directeur exécutif de l’agence. Pour atteindre l’objectif à 100 %, les gouvernements doivent encore relever leurs ambitions et assurer leur mise en œuvre effective.
Analyse
Un peu d’espoir subsiste tout de même. En 2023, l’augmentation des capacités d’énergie renouvelable a atteint un niveau record à l’échelle mondiale, avec 560 GW environ ajoutés en un an, soit une hausse de 64 % par rapport à celle de 2022. Le solaire et l’éolien, qui représentent respectivement la moitié et le quart des capacités que les gouvernements envisagent d’installer, sont toujours moins chers que les combustibles fossiles et cette dynamique devrait se poursuivre, affirme l’AIE. Certains pays progressent même plus rapidement que leurs objectifs nationaux, à l’instar de la Chine qui, en 2023, a ajouté plus de nouvelles capacités de renouvelable que le reste du monde réuni.
Reste à relever des défis majeurs, comme raccourcir les longs délais d’attente pour les permis de projet, revoir les investissements, souvent inadéquats, dans les infrastructures de réseau ou encore abaisser les coûts, particulièrement élevés dans les pays émergents et en développement. «La croissance record de l’an dernier met l’objectif de triplement à notre portée, et devrait donner aux dirigeants suffisamment de confiance pour revoir à la hausse» leurs engagements, tient à positiver Katye Altieri, analyste au centre de réflexion sur l’énergie Ember.