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Libération
Merci de l'avoir posée

Qu’est-ce que Riposte alimentaire, le collectif qui asperge les tableaux de soupe ?

Samedi 10 février, deux activistes ont aspergé de soupe le «Printemps» de Claude Monet au musée des Beaux-Arts de Lyon. Né à la suite de l’arrêt de la campagne Dernière Rénovation, ce collectif vise à instaurer une «Sécurité sociale de l’alimentation».
L'action de Riposte alimentaire contre le «Printemps» de Claude Monet, samedi 11 février au musée des Beaux-Arts de Lyon. (Capture d'écran X Riposte Alimentaire)
publié le 11 février 2024 à 17h11

«Nous sommes la dernière génération capable d’empêcher un effondrement sociétal». Voilà comment se présente le collectif Riposte alimentaire sur son site internet. Après avoir aspergé de soupe la vitre pare-balles protégeant la Joconde au musée du Louvre le 28 janvier, les activistes ont remis le couvert samedi 10 février, cette fois-ci à Lyon. Les militantes de Riposte alimentaire ont jeté leur velouté à la face du Printemps de Claude Monet, exposé au musée des Beaux-Arts de la ville. «Ce printemps sera le seul qui nous restera si nous ne réagissons pas. Que vont peindre nos futurs artistes ? A quoi rêverons-nous s’il n’y a plus de printemps ?» ont ensuite clamé les deux jeunes femmes.

Sur X, Riposte alimentaire a justifié leur action coup de poing par la volonté, une nouvelle fois, d’«alerter sur la crise climatique et sociale à venir. Selon l’observatoire européen Copernicus, la planète a connu pour la première fois un réchauffement de plus de 1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle, sur une période de douze mois». Le collectif pointe le rôle de l’agriculture dans «la détérioration de notre biodiversité et […] l’appauvrissement des sols».

Changement de stratégie et de nom

Riposte alimentaire s’inscrit dans la continuité de Dernière Rénovation. Entre avril 2022 et décembre 2023, ce collectif s’est distingué par des actions spectaculaires : blocages du périphérique par des militants allongés sur la route, jets de peinture sur la façade de ministères. Le 4 janvier 2023, c’est l’entrée de Matignon qui est visée, repeinte en orange pour dénoncer «l’action climatique de façade du gouvernement». Riposte alimentaire fait partie de Réseau A22, un réseau international déployé au sein de douze pays.

Au Royaume-Uni, il comprend le mouvement Just Stop Oil, connu pour avoir aspergé de soupe les Tournesols de Van Gogh en 2022. Réseau A22 est aussi présent en Suisse avec le mouvement Renovate Switzerland, ou encore en Suède avec les activistes d’Aterställ Vatmarker («restitue les zones humides» en français). En juin 2023, deux militantes membres d’Aterställ Vatmarker s’étaient rendues au musée national de Stockholm, avant de badigeonner de peinture rouge la vitrine protégeant le Jardin de l’artiste à Giverny de Claude Monet, et d’y coller leurs mains.

En France, le collectif Dernière Rénovation acte en décembre 2023 la fin des actions chocs. Leur objectif était de promouvoir un large plan de rénovation thermique des bâtiments. Mais ce n’est pas la fin du mouvement pour autant, juste une réorganisation. Dans un entretien accordé à Reporterre, Riposte alimentaire, qui dit compter dans ses rangs entre 300 et 500 membres, précise que le mode opératoire du collectif ne devrait pas «changer radicalement» de la tactique adoptée par Dernière Rénovation.

Toutefois, leurs actions pourraient viser «plus explicitement les acteurs qui posent problème dans ce secteur, comme le monde de l’agrobusiness et de la grande distribution». Un changement de stratégie, et de nom, pour désormais se focaliser sur «l’intégration de l’alimentation dans le régime général de la Sécurité sociale». Cette demande s’inscrit dans la droite lignée de celle du collectif Sécurité sociale de l’alimentation, qui appelle à créer un droit à l’alimentation tout en dénonçant un accès de plus en plus difficile à «de la nourriture saine et abondante». Riposte alimentaire, lui, souhaite que chaque citoyen puisse accéder à 150 euros par mois de produits alimentaires.

Sur son site web, le collectif plaide en outre pour l’instauration d’une «carte Vitale de l’alimentation» : 150 euros par mois et par personne, grâce à un «système de cotisations», pour avoir accès à des produits conventionnés. «Pour être conventionnés, les produits devront être validés démocratiquement et localement, selon notamment des critères environnementaux», préconise Riposte alimentaire, qui défend «un accès à une alimentation saine qui rémunère dignement les paysannes et les paysans». Le collectif rappelle ainsi qu’une personne sur trois en France ne mange pas trois repas par jour, faute de moyens, ou encore que 30 % de notre empreinte carbone est liée à l’alimentation. En mai 2023, une étude publiée par le Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Crédoc) révélait que 16 % des Français ne mangeaient pas à leur faim, conséquence directe de la hausse des prix des produits alimentaires, avec une inflation qui dépasse les 10 % sur certains produits.