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Inaction climatique

Suède : des militants écologistes, dont Greta Thunberg, relancent leurs poursuites contre l’Etat

Des militants écologistes, dont Greta Thunberg, ont annoncé lundi 14 avril qu’ils avaient l’intention de poursuivre leur action en justice contre l’Etat suédois pour inaction climatique, deux mois après que la Cour suprême du pays a rejeté leur plainte.
L'activiste climatique Greta Thunberg (deuxième à partir de la droite) participe à une manifestation devant l'assemblée générale annuelle de la banque suédoise SEB, le 1er avril à Stockholm. (Fredrik Sandberg/AP)
publié le 14 avril 2025 à 19h18

Greta Thunberg ne lâche pas l’affaire. Elle et d’autres jeunes militants écologistes comptent relancer leur action en justice visant à exiger que la Suède prenne davantage de mesures pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre. Inédite dans ce pays nordique, elle avait été déposée en novembre 2022 au tribunal de Nacka près de Stockholm par un particulier, 300 autres personnes, surtout des jeunes, s’étant jointes à lui dans le cadre d’un recours collectif sous le nom d’Aurora. Les jeunes gens y demandaient à l’Etat de «faire sa part dans la lutte mondiale» pour limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C par rapport aux niveaux pré-industriels.

Mais en février, la Cour suprême de Suède a déclaré la plainte irrecevable, soulignant les «exigences très élevées pour que des particuliers aient le droit de déposer une telle plainte» contre un Etat. Toutefois, elle avait ajouté qu’«une association qui remplit certaines conditions peut avoir le droit d’intenter une action en justice sur le climat».

Aurora a donc demandé au tribunal de district de Nacka, où la première plainte est toujours en instance, de pouvoir reprendre ces poursuites en tant qu’association. «D’une manière ou d’une autre, Aurora continue de porter devant les tribunaux suédois la question des obligations légales de l’Etat suédois dans le cadre de la crise climatique», a déclaré l’association dans un communiqué.

Mauvaise trajectoire

Le Conseil suédois de la politique climatique et l’Agence de protection de l’environnement ont tous deux récemment averti que les politiques du gouvernement de droite entraîneraient une augmentation des émissions. Ces deux organismes ont jugé que la Suède, qui vise la neutralité carbone d’ici à 2045, n’était pas sur la bonne voie pour atteindre ses objectifs climatiques et respecter les engagements de l’Union européenne. Le pays, dirigé par un gouvernement de coalition composé de la droite et de l’extrême droite, fait même marche arrière au lieu d’accélérer la cadence de réduction des émissions. La ministre suédoise du climat, Romina Pourmokhtari, a déclaré qu’elle n’était «pas particulièrement préoccupée» par les rapports des deux organismes.

«Si des puissances riches, fortement émettrices et pleines de ressources comme l’Etat suédois agissent immédiatement pour changer fondamentalement leurs systèmes économiques, nous avons une chance de sortir de ces crises planétaires et de construire un monde durable et juste. Nous ne pouvons pas laisser l’Etat gâcher cette chance», a déclaré Ida Edling, porte-parole d’Aurora.

Montée en puissance

Les militants gardent espoir car une autre affaire visant l’Etat a récemment été gagnée en Europe. Dans une décision historique d’avril 2024, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a estimé que la Suisse ne faisait pas assez d’efforts pour lutter contre le changement climatique. En décembre 2019, la Cour suprême des Pays-Bas avait également ordonné au gouvernement de réduire les émissions de gaz à effet de serre d’au moins 25 % d’ici à 2020, dans une autre affaire majeure portée par une ONG environnementale.

«Les recours contre l’Etat montent en puissance et sont de plus en plus sophistiqués», rappelait récemment Christel Cournil, spécialiste en droit public, dans une interview accordée à Libération. En Europe, ils concernaient jusqu’ici le premier pilier de la lutte climatique qu’est l’atténuation, c’est-à-dire la baisse des émissions de gaz à effet de serre. Mais une action novatrice en France vise désormais le second pilier : l’adaptation au climat futur. Trois ONG de l’Affaire du siècle se sont associées à des associations locales et des citoyens dont le quotidien est affecté par le changement climatique pour sommer l’Etat de mieux protéger les Français. Une longue procédure a été enclenchée le 8 avril.