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Récifs

Un groupe de 160 scientifiques annonce la disparition à venir des coraux tropicaux

Le monde est au seuil d’une «réalité nouvelle» sous l’effet du changement climatique dont certaines conséquences sur les récifs d’eau chaude sont probablement déjà irréversibles, alerte une étude publiée lundi 13 octobre.

Les récifs connaissent depuis dix ans un épisode massif de blanchissement, signe de dépérissement. (Michel Renaudeau/Only France. AFP)
Publié le 13/10/2025 à 12h08

Depuis 2023, les scientifiques observent une mortalité des coraux «sans précédent», alerte une étude publiée lundi 13 octobre. «Malheureusement nous sommes désormais quasi certains que nous avons franchi [un point] de bascule pour les récifs coralliens tropicaux d’eaux chaudes», se désole auprès de l’AFP son auteur principal, Tim Lenton, chercheur en sciences de l’environnement de l’université d’Exeter (Royaume-Uni).

Avec une équipe internationale de quelque 160 chercheurs, il s’est penché sur l’état de santé de la planète en scrutant des «points de bascule» («tipping point» en anglais). Cette notion décrit un changement d’état rapide d’un écosystème ou d’une des composantes physiques du climat. Si un tel seuil est franchi, un effet domino de catastrophes en cascade, souvent irréversibles, peut se déclencher.

A 1,4 °C de réchauffement par rapport à l’ère préindustrielle, les récifs coralliens «subissent un dépérissement sans précédent, affectant la subsistance de centaines de millions de personnes qui en dépendent», ainsi que la survie d’un million d’espèces marines, concluent les experts. Les récifs connaissent depuis dix ans un épisode massif de blanchissement, signe de dépérissement.

«Nouvelle réalité»

Les coraux – barrières contre l’érosion et réservoirs de biodiversité, qui stockent également le carbone – blanchissent sous l’effet de la chaleur, ce qui les rend particulièrement vulnérables au réchauffement climatique. Dans des océans plus chauds, ils expulsent les micro-organismes qui leur donnent leurs couleurs vives et leur fournissent leur nourriture, finissant par mourir de faim. Les coraux morts ne laissent que des squelettes sans tissus vivants, qui seront recouverts progressivement par des algues et colonisés par des organismes plus simples, avant de s’éroder et se briser.

Les chercheurs estiment qu’avec une hausse de la température mondiale de 1,5 °C de réchauffement par rapport à l’ère préindustrielle, la vaste majorité de ces récifs seront condamnés. Cela pourrait survenir dans quelques années sauf réduction drastique des émissions de gaz à effet de serre. Cette limite de réchauffement, la plus ambitieuse de l’accord de Paris (2015), est «sur le point de s’effondrer», a récemment alerté le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres. Et la dépasser placerait «le monde dans une zone de danger encore plus grand», affirme Tim Lenton. L’étude parle même d’une «nouvelle réalité».

Le moment de la publication n’a pas été choisi au hasard. Les négociateurs du monde entier se réunissent à Brasília (Brésil) pour une pré-COP pendant deux jours à partir de ce lundi 13 octobre, un mois avant l’ouverture de la grande conférence annuelle sur le climat à Belém. Depuis deux ans, les alertes se multiplient, signe que l’état de santé de la Terre se dégrade. D’autres seuils sont également menaçants : fonte irréversible des calottes glaciaires polaires, effondrement de courants océaniques cruciaux ou dépérissement de la forêt amazonienne, se tiendra la COP30. «Nous nous approchons rapidement de points de bascule planétaires multiples qui pourraient transformer notre monde, avec des conséquences dévastatrices pour les humains et la nature, met en garde Tim Lenton. Cela exige des mesures immédiates et inédites des dirigeants à la COP30 et des responsables politiques dans le monde.»

Mais les scientifiques mettent aussi en avant dans leur étude des avancées ces deux dernières années, avec des points de basculement «positifs» susceptibles d’entraîner des effets favorables au climat en cascade. Certains secteurs ont déjà franchi le seuil qui rend leur développement irréversible : énergies solaire et éolienne devenues bon marché à travers le monde et adoption des véhicules électriques, batteries de stockage d’électricité ou pompes à chaleur sur certains marchés.