Les riches font grimper la température, les plus vulnérables subissent les répercussions. D’après une étude publiée ce mercredi 7 mai dans Nature Climate Change, les 10 % des personnes les plus aisées au monde sont responsables des deux tiers du réchauffement climatique depuis 1990. S‘il est de notoriété publique que les plus riches polluent davantage que les plus pauvres, c’est la première fois que des chercheurs arrivent à quantifier comment le mode de vie, la consommation personnelle et les investissements financiers des plus riches ont une importance significative dans l’apparition, depuis plusieurs années, d’événements météorologiques extrêmes liés à la hausse des températures.
Dix-sept fois plus responsables des sécheresses en Amazonie
«Nous établissons un lien direct entre l’empreinte carbone des individus les plus riches et les impacts climatiques», a déclaré à l’AFP Sarah Schöngart, de l’école polytechnique fédérale de Zurich, autrice principale de l’étude réalisée entre l’Autriche, la Suisse et l’Allemagne. «On passe ainsi de la comptabilité des émissions carbone à la responsabilité climatique», a-t-elle ajouté. De manière plus précise encore, les chercheurs ont démontré que les 10 % des personnes les plus riches vivant en Chine et aux Etats-Unis ont chacune multiplié par deux ou trois les extrêmes de chaleur. Ces quelques individus représentent à eux seuls près de la moitié de la pollution mondiale liée au carbone.
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Autre donnée alarmante : par rapport à la moyenne mondiale, les 1 % des plus fortunés ont contribué 26 fois plus aux vagues de chaleur extrêmes, et 17 fois plus aux sécheresses en Amazonie. Pour arriver à ces conclusions, Sarah Schöngart et ses collègues ont combiné données économiques (revenus, investissements) et modèles climatiques. Ils ont ainsi pu mesurer les émissions des différents groupes de revenus dans le monde et connaître leur influence sur les événements climatiques extrêmes, comme les vagues de chaleur ou les sécheresses. De ce fait, les chercheurs mettent en évidence le rôle prépondérant des importants investissements financiers par les plus riches dans les émissions de gaz à effet de serre… Participant activement au réchauffement climatique.
Taxer les riches
«Une action climatique, qui ne prendrait pas en compte les responsabilités démesurées des plus riches, risque de passer à côté de l’un des leviers les plus puissants dont nous disposons pour réduire les dommages futurs», estime Carl-Friedrich Schleussner, directeur du Groupe de recherche intégré sur les impacts climatiques à l’Institut international d’analyse des systèmes appliqués, près de Vienne. Les détenteurs de capitaux, a-t-il noté, pourraient rendre des comptes de leurs impacts climatiques par le biais d’impôts progressifs sur la fortune et les investissements favorisant les émissions carbone.
Décryptage
Des recherches antérieures ont montré que la taxation des émissions liées aux actifs est plus équitable que les taxes carbone appliquées à l’ensemble de la population, qui ont tendance à peser sur les plus faibles revenus. L’année dernière, le Brésil avait plaidé en faveur d’une taxe de 2 % sur le patrimoine net des particuliers détenant plus d’un milliard de dollars d’actifs. Bien que les dirigeants du G20 aient convenu de «coopérer pour garantir une imposition efficace des personnes fortunées», les récentes initiatives sur cette question sont pour la plupart au point mort, notamment depuis l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche.