Pas de répit pour les sinistrés. Météo-France maintient la vigilance rouge en Seine-et-Marne et Eure-et-Loir samedi, un niveau d’alerte synonyme de «risque de crue majeure» avec «menace directe» pour la sécurité des personnes et des biens. Un seul autre département, le Loir-et-Cher reste en vigilance orange pour les crues.
En Seine-et-Marne, placée en vigilance rouge dès mercredi après-midi, la préfecture estime que «le passage de la dépression prévue demain (samedi) ne devrait pas apporter trop de pluie pouvant mettre en cause la décrue». Les seuils de la crue de 2016 ont été atteints ou dépassés sur le Grand Morin, affluent de la Marne - il est sorti de son lit jeudi. Malgré l’embellie, la crue se prolonge dans certains secteurs du département. L’exemple de Crécy-la-Chapelle, au sud de Meaux, qui avait encore les pieds dans l’eau ce vendredi. «On prend la crue de Coulommiers. Dans le centre-ville l’eau arrive aux genoux» et «les trois accès à la ville sont coupés», précisait le premier adjoint au maire, Fabrice Laborde. Au moins une cinquantaine de personnes en difficulté, fragiles ou seules, ont été évacuées, selon lui.
Dans cette ville de 4 800 habitants traversée par le Grand Morin, «nous sommes en phase de reflux mais c’est assez lent» et certains habitants «sont en difficultés psychologiques», précise la préfecture. Selon un bilan du ministère de l’Intérieur, les intempéries et crues provoquées par Kirk ont à ce stade fait un blessé grave et onze blessés légers.
Reportage
En Eure-et-Loir, «les cours d’eau regagnent leur lit», avec un «retour progressif à la normale», a décrit Hervé Jonathan ce vendredi matin, préfet du département où près de la moitié des communes ont été concernées par les inondations, dans le sillage de la dépression Kirk. 860 interventions ont été effectuées par les secours depuis le début des crues, avec 260 personnes «mises en sécurité».
Dans le secteur de Cloyes-les-Trois-Rivières, le pic de crue était prévu à 16h30, selon la préfecture dans un point à la mi-journée. A 15 heures, le Loir a atteint 1,83 mètres de haut sur la commune : niveau historique, alors que le pic de janvier 1995 avait plafonné à 1,80 mètres, selon les relevés de l’organisme gouvernemental Vigicrues. La décrue devrait avoir lieu dans la ville cette nuit. Ailleurs, comme à Châteaudun où les maisons avaient les pieds dans l’eau vendredi matin, le niveau de l’eau était en baisse dans l’après-midi, tout comme à Saint-Denis-Lanneray.
Jeudi après-midi, «des débordements importants» ont aussi submergé «les secteurs de Bonneval et de Saint-Maur-sur-le-Loir», selon Vigicrues. Des rues ont été inondées, des écoles fermées et des logements sinistrés. Dans la soirée, plusieurs rues de Bonneval, la «Venise de la Beauce», étaient totalement inondées et impraticables à la circulation. «On a un niveau des eaux qui est monté très, très fort puisqu’on a dépassé la crue de 1961 et on est arrivé à 10-12 cm de la crue de 1881, qui était la crue de référence à Bonneval», expliquait le maire, Eric Jubert, surpris par l’ampleur des inondations. Il estimait toutefois que le pire était passé car la décrue s’est amorcée dans la soirée : «on a déjà perdu quelques centimètres.» Une soixantaine de personnes au total ont dû être évacuées, selon Eric Jubert, dont une vingtaine étaient hébergées dans la salle des fêtes de la commune de 5 000 habitants, où des lits de camp ont été installés tandis que des agents municipaux distribuent de la nourriture.
Une mission d’inspection annoncée «pour faire un retour d’expérience»
Dans le Loir-et-Cher, en vigilance orange jusqu’à samedi, le niveau du Loir continuait de monter, avertissait vendredi matin la mairie de Vendôme. L’hôpital de la ville et un Ehpad ont été évacués préventivement. «Les pluies récentes en amont de Vendôme provoquent une montée des eaux décalée d’environ 24 heures», explique la mairie dans un communiqué.
La tempête Kirk a nécessité 3 700 interventions des sapeurs pompiers, a indiqué jeudi le Premier ministre Michel Barnier, assurant que l’Etat serait présent «dans la gestion post-crise» de ces événements «très graves». Si le phénomène a provoqué le décès d’un plaisancier en Méditerranée, aucun blessé n’était recensé jeudi en Seine-et-Marne ou en Eure-et-Loir. La pluie a cessé sur ces départements mais l’épisode devait se poursuivre plus à l’est, et il est «probable que l’eau recommence un peu à monter», a prévenu la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, lors d’une visite à Coulommiers (Seine-et-Marne), une ville à moitié inondée par «une crue hors norme», selon la mairie. La ministre a également indiqué qu’ «après le temps de l’urgence», il y aurait «le temps de la réparation» et qu’une mission d’inspection serait lancée «pour faire un retour d’expérience».
Interview
Ailleurs sur le territoire, les fortes précipitations depuis mercredi ont pu atteindre 120 à 130 mm dans les Alpes-Maritimes, aggravées par des rafales de vent jusqu’à plus de 110 km/h, perturbant le fonctionnement d’écoles, ainsi que le trafic routier et ferroviaire. En région parisienne, les précipitations ont provoqué près de 500 interventions, essentiellement dans des caves et sous-sol inondés, et certaines dans des sites prestigieux comme l’Assemblée nationale ou le musée des Armées aux Invalides.
Le gestionnaire du réseau de distribution d’électricité Enedis a pour sa part indiqué qu’il restait jeudi à 18 h 00 encore 20 000 clients privés de courant, notamment dans les Pyrénées-Atlantiques (7 400) et le Doubs (3 300). Au terme du mois de septembre le plus pluvieux depuis 25 ans, les cumuls moyens annuels de précipitations ont déjà été dépassés un peu partout en France métropolitaine.
Mise à jour : à 18 h 30 avec bilan de la journée et perspectives pour samedi 12 octobre.