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Libération
Justice climatique

Devoir de vigilance : les actions intentées contre Total et EDF jugées recevables

A la suite de la décision de la cour d’appel de Paris ce mardi 18 juin sur les actions intentées par des ONG contre de grandes entreprises accusées de manquement à leur devoir de vigilance, celles-ci devront répondre sur le fond de leur responsabilité écologique.
Des manifestants pour le climat devant le siège de TotalEnergies à La Défense, à Courbevoie, le 3 novembre 2023. (Alain Jocard/AFP)
publié le 18 juin 2024 à 14h44

Le droit pourrait-il bientôt permettre de contraindre TotalEnergies à réduire - enfin - ses émissions de gaz à effet de serre ? Une première étape vient en tout cas d’être franchie : la cour d’appel de Paris a estimé, ce mardi 18 juin, que l’action lancée en ce sens il y a quatre ans par une coalition d’associations et de collectivités territoriales était recevable. Elle va donc pouvoir être examinée sur le fond. Les actions lancées contre EDF et une ancienne filiale de Suez, accusées elles aussi par des ONG d’avoir manqué à leur devoir de vigilance, ont également été jugées recevables.

Il s’agit des premières décisions d’une nouvelle chambre créée à la cour d’appel et entièrement dédiée aux contentieux «émergents», liés au devoir de vigilance et à la responsabilité écologique des entreprises. Dans l’affaire la plus médiatisée à ce jour dont est saisie la cour d’appel, une coalition d’ONG et de collectivités avait mis en demeure puis assigné TotalEnergies pour la contraindre à aligner sa stratégie climatique sur l’accord de Paris.

En première instance, le tribunal judiciaire de Paris avait estimé en juillet 2023 que cette coalition n’avait pas respecté l’exigence d’une phase de dialogue avec le géant pétrolier avant de l’assigner en justice.

Seule une condamnation à ce jour

Dans les deux autres dossiers, concernant un projet de parc éolien d’EDF au Mexique et la gestion de l’eau dans la ville d’Osorno au Chili par une ex-filiale de Suez passée sous le giron de Veolia, le tribunal avait relevé que les mises en demeure et les assignations des sociétés ne portaient pas sur le même plan de vigilance. A l’audience, le 5 mars, les représentants des ONG avaient alerté sur une potentielle «mise au rebut du devoir de vigilance français», en cas de confirmation des irrecevabilités. Les avocats des entreprises assignées avaient eux demandé cette confirmation, et mis en garde contre des décisions pouvant «rendre illisible une loi qui est là pour responsabiliser les entreprises».

La France avait été pionnière en adoptant en 2017 une loi obligeant les entreprises qui emploient plus de 5 000 salariés dans l’Hexagone et plus de 10 000 dans le monde à publier un plan de vigilance. A ce jour, seule une procédure a abouti à une condamnation, celle en première instance en décembre 2023 de La Poste pour les conditions d’emploi de travailleurs sans papiers au sein de ses filiales. Le groupe a annoncé en mars avoir fait appel.

Hasard du calendrier, cette décision de la cour d’appel de Paris intervient la veille de la présentation des conclusions du rapport de la commission d’enquête du Sénat sur les moyens de l’État pour faire respecter par TotalEnergies les obligations climatiques et les orientations de politique étrangère de la France.