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Interview

Dominique Potier : «En France, 99 % de l’accaparement des terres n’est pas le fait d’investisseurs étrangers»

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Comment est-on passé «de la ferme à la firme», soit d’un modèle d’après guerre basé sur le syndicalisme agricole et le gaullisme social à des terres que les agriculteurs français ne possèdent plus ? Entretien avec le député de Meurthe-et-Moselle Dominique Potier, lui-même agriculteur et spécialiste du sujet.
Dans le Morbihan, jeudi. (Fabrice Picard/Libération)
publié le 27 février 2023 à 20h30

Député socialiste de Meurthe-et-Moselle depuis 2012, Dominique Potier est également agriculteur et travaille sur la question du foncier et de l’accaparement des terres agricoles. Il appelle le gouvernement à une grande réforme sur le sujet, qui pourrait intervenir dans la future loi d’orientation agricole, présentée en juin au Parlement.

On parle d’accaparement des terres, mais historiquement le marché foncier français ne fait-il pas partie des plus régulés ?

Après guerre, le syndicalisme agricole lié au gaullisme social crée des instruments d’une audace extraordinaire qu’on n’imaginerait même pas aujourd’hui. Ils mettent en place les Safer, des organismes qui ont une capacité de préemption sur le marché, un contrôle du droit d’exploiter [qui fixe un seuil d’agrandissement maximum des fermes, ndlr] et le statut du fermage [qui protège l’agriculteur qui loue des terres à un propriétaire, ndlr]. C’est fait pour privilégier un esprit d’entreprise et le travail par rapport à la rente. L’idée, c’est de nourrir La France et de moderniser l’agriculture en s’appuyant sur une génération d’entrepreneurs. C’est de dire que la terre doit aller à ceux qui en ont besoin, plus qu’à ceux qui en ont les moyens.

Qu’est-ce qui fait que ce système s’est peu à peu fragilisé ?

A partir des années 2000-2010, s’insinue petit à petit une forme de libéralisation du marché. Cette dérégulation est introduite par des lois dites de simplification et permise par un délitement de la