L’association de défense de l’environnement Générations Futures publie ce mercredi un nouvel état des lieux de la contamination par les pesticides des fruits, des légumes et des céréales de l’agriculture conventionnelle commercialisés en France. En se basant sur les dernières données brutes des plans de surveillance de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), l’ONG a établi que 63,1 % des échantillons contenaient au moins un résidu de pesticide en 2020.
Changement de méthode de calcul
Un chiffre bien plus élevé que celui affiché habituellement par les autorités. Et pour cause : «La DGCCRF distingue désormais dans ses résultats globaux les végétaux bios des non-bios permettant ainsi de ne pas fausser les conclusions», souligne François Veillerette, porte-parole de Générations Futures, qui rappelle qu’auparavant «la présence de résidus de pesticides dans les fruits et légumes non-bios étaient bien supérieure à celle annoncée quand bio et non-bio étaient mélangés». En 2020, l’association de défense de l’environnement s’est en effet rendu compte que les échantillons contrôlés étaient issus à la fois de productions biologiques et conventionnelles, faussant le comparatif.
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Autre nouveauté de la DGCCRF, «en plus de présenter le pourcentage de végétaux contenant des résidus de pesticides supérieurs à la limite de quantification (LQ), c’est-à-dire la valeur au-dessus de laquelle un résidu peut être mesuré avec précision, elle intègre dans ses statistiques de 2019 et 2020 le pourcentage de résidus de pesticides jusqu’ici non quantifiés, inférieurs à la LQ mais supérieurs à ce qu’on appelle la limite de détection (LD)», précise encore le porte-parole. En d’autres termes, l’instance de contrôle, dépendante du ministère de l’Economie et chargée de la sécurité des consommateurs, prend en compte les pesticides détectés mais ils ne sont pas mesurés avec précision. Avec cette donnée supplémentaire, le pourcentage passe donc de 54,5 % (si on se base seulement sur la LQ) à 63,1 % (en intégrant la LD) des fruits, légumes et céréales non-bios contenant des résidus de pesticides. Soit près des deux-tiers des échantillons examinés. A noter cependant que l’étude ne pose pas la question de la toxicité, les seuils à risques pour la santé – qui sont bien plus élevés, et que conteste l’ONG – n’étant pas atteints.
Usage massif des pesticides
Générations futures, qui considérait jusque-là que la présence de résidus de pesticides était «grandement sous-estimée», se félicite de cette évolution notable dans les calculs de la DGCCRF. «Le pourcentage réel d’échantillons en contenant est 37 % plus élevé que celui qui aurait été présenté avec l’ancienne méthode, analyse Générations Futures qui s’interroge d’ailleurs sur le manque de communication des chiffres de la DGCCRF par le gouvernement. Pour les échantillons prélevés en 2019, cette différence était même encore plus importante : +56 %.» L’association incite la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à poursuivre ses efforts de transparence, lui suggérant également d’autres améliorations possibles. Notamment de «présenter ce type de chiffres par type de denrées (fruits, légumes, céréales) ou même par denrée (cerises, fraises, épinards…)», ce qui était déjà le cas lorsque qu’il était question des chiffres basés sur la limite de quantification et des mélanges bio et non-bio, publiés notamment en 2019.
Encore aujourd’hui, l’usage massif des pesticides reste de mise, avec notamment la réautorisation en 2020 des pesticides néonicotinoïdes, alors que leur interdiction avait été prévue par la loi biodiversité de 2016. Autre dossier chaud, le glyphosate. Fin 2017, Macron promettait que la France se passerait d’ici à la fin 2020 de ce pesticide classé «cancérigène probable» par l’OMS. En 2022, la promesse n’est toujours pas tenue. De la même manière, le plan Ecophyto (dont le dernier rapport aurait été dissimulé d’après l’association France Nature Environnement) visant à réduire de moitié l’usage des pesticides à l’horizon 2018 est reporté à 2025. D’après Générations Futures, «il est donc plus urgent que jamais de relancer Ecophyto au niveau national et la publication du nouveau règlement sur l’utilisation durable des pesticides au niveau européen, pour pouvoir enfin diminuer notre dépendance aux pesticides !»