Visage inchangé à l’écologie. La macroniste Agnès Pannier-Runacher, 51 ans, membre du gouvernement depuis sept ans, a été reconduite dimanche 5 octobre au poste de ministre de la Transition écologique qu’elle occupe depuis septembre 2024. A priori, ses attributions restent les mêmes.
Comme dans le gouvernement de François Bayrou, son portefeuille comprend également la Biodiversité, la Forêt, la Mer et la Pêche. Le volet de l’Energie reste à Bercy (c’est donc Roland Lescure, qui s’occupera désormais de la «Souveraineté industrielle et énergétique») et l’ancienne haute fonctionnaire ne récupère pas non plus les Transports (Philippe Tabarot) et le Logement (Eric Woerth). Trois dossiers pourtant centraux pour mener à bien la politique de décarbonation du pays.
Sur le plan protocolaire, le ministère de la Transition écologique occupe la onzième place : c’est un rang de mieux que dans le précédent gouvernement, mais très loin de la troisième position qu’il détenait au début du premier quinquennat d’Emmanuel Macron. Difficile d’y voir uniquement un symbole dans un contexte actuel si difficile pour l’environnement.
Voilà des mois qu’Agnès Pannier-Runacher, qui devrait donc se rendre à Belém, au Brésil, fin novembre, pour représenter la France à la COP30, pilote un navire écologique à la dérive. Isolée dans des gouvernements affaiblis, et sous la pression du backlash venu de la droite et de l’extrême droite, elle a dû presque seule affronter une pluie d’amendements et de textes anti-environnementaux, entre la suppression des zones à faibles émissions, le torpillage de l’objectif zéro artificialisation nette ou encore l’adoption de la loi Duplomb (que le Conseil constitutionnel a, depuis, en partie censurée).
Deux textes phare dans les tiroirs
Tous ces dossiers ou presque ont, de surcroît, été négligés par l’exécutif (quand celui-ci ne coupait pas dans ses budgets). Si Agnès Pannier-Runacher a su convaincre Michel Barnier d’adopter le troisième plan national d’adaptation au changement climatique après de longues tergiversations (document qui suscite, par ailleurs, des réserves chez les spécialistes et les associations environnementales), elle n’a pas réussi à faire sortir des tiroirs les deux autres textes phare qui sont attendus depuis plus de deux ans, à savoir la troisième stratégie nationale bas carbone (dite «SNBC3», qui doit détailler les mesures de décarbonation à réaliser secteur par secteur) et la troisième programmation pluriannuelle de l’énergie (dite «PPE3», qui doit définir les grandes orientations de la transition énergétique du pays). La SNBC3, bouclée par ses équipes cet été, a atterri pour l’heure dans un trou noir. La PPE3, qui devait être publiée par décret au Journal officiel fin juillet, après un dernier coup de fouet impulsé par le cabinet de son homologue Marc Ferracci (alors ministre de l’Industrie et de l’Energie), a été bloquée in extremis par Matignon.
«Au regard de l’urgence climatique et des attentes des Français, c’est avec lucidité, gravité et détermination que j’aborde la poursuite de ma mission», a réagi Agnès Pannier-Runacher ce dimanche soir. Il y a un mois, à l’occasion d’un discours prononcé lors d’un événement organisé par Météo France, elle avait formulé le vœu de voir son ministère devenir celui de «l’Urgence écologique». «Les choses seraient sans doute plus claires qu’avec le mot transition, dont il faut bien reconnaître que les Français ne savent pas trop où elle va», avait-elle déclaré.
La logique de continuité qu’elle incarne ne sera utile que si l’arrivée de Sébastien Lecornu à Matignon, et de ses nouveaux collègues à Bercy, aux Transports et au Logement, marque une rupture nette avec les derniers mois et redonne crédit et élan à son ministère. De l’aveu de tous les experts et instances chargés d’évaluer l’action publique climatique, il est temps que l’exécutif se réveille : le pays s’écarte de manière alarmante de la trajectoire de décarbonation nécessaire pour respecter ses engagements de baisses des émissions de gaz à effet de serre (-55 % en 2030 par rapport à 1990). «La transition écologique doit être menée sans délai», a exhorté la Cour des comptes mi-septembre, à l’occasion de la publication de son premier rapport annuel consacré au sujet.