Tout semblait enfin entrer dans l’ordre à l’approche des Jeux olympiques. Le volume d’eau s’écoulant dans la Seine était redescendu pour atteindre un niveau acceptable en début de semaine. Les résultats d’analyses sur la qualité sanitaire du fleuve étaient enfin dans les normes. La maire de Paris, Anne Hidalgo, qui promet depuis 2016 que la Seine sera baignable pour les JO, avait donc fixé une date de rattrapage pour son grand plongeon, initialement prévu le 23 juin. Le 17 juillet, elle doit se jeter à l’eau près de l’Hôtel de ville. Mais les fortes pluies récentes pourraient compromettre le rendez-vous.
Vendredi, selon Météo France, 20 mm de pluie se sont abattus sur la capitale en douze heures. C’est un tiers de ce qui tombe d’ordinaire pendant tout un mois de juillet. Les trombes d’eau ont relancé le débit de la Seine dès 2 heures du matin vendredi, selon le site Vigicrues. Celui-ci a grimpé pour frôler à la mi-journée 600 m³/s, soit quatre fois plus que la normale estivale. Il se maintient désormais un peu au-dessus de 500 m³/s. Météo France note que la hauteur d’eau a également bondi de 50 cm en quelques heures et invite à «surveiller les bassins-versants en amont de la Seine et de la Marne» pour anticiper les jours à venir sans déceler toutefois de «signaux inquiétants à ce sujet». L’Yonne, affluent copieusement arrosé, pourrait aussi apporter de l’eau en différé. Les prévisions de crue communiquées à Libération par la préfecture d’Ile-de-France indiquent que le débit de la Seine devrait encore être «à la hausse ce week-end puis à la baisse à partir de lundi».
Cinq jours pour redescendre à un niveau sûr
Les quatre grands lacs artificiels situés en amont de Paris, qui contribuent à réguler le débit du fleuve n’ont pas pu jouer un rôle de tampon, d’une part parce qu’ils sont déjà très remplis, et, d’autre part, parce que les précipitations se sont essentiellement abattues entre ces ouvrages et la capitale, précise à Libération le gestionnaire Seine Grands Lacs. «A la demande des services de l’Etat», ces réservoirs relâchent moins d’eau que prévu dans la Seine.
La Seine n’avait pas connu de débit aussi élevé depuis le 23 juin… date à laquelle Anne Hidalgo devait initialement se baigner. Ce jour-là, un pic à 660 m³/s avait été atteint, bien trop dangereux pour tenter de faire trempette. Sans compter la mauvaise qualité de l’eau après de nombreux jours de pluie sur la Seine et ses affluents. Le chiffre avait mis environ une semaine à redescendre, pour se stabiliser autour de 400 m³/s. Il était reparti à la hausse début juillet à cause d’une crue de la Marne, un des affluents de la Seine, et baissait depuis très lentement.
Selon le préfet d’Ile-de-France, Marc Guillaume, cité vendredi par l’AFP, les règlements permettent d’aller «grosso modo jusqu’à 450 m³/s» pour autoriser la tenue des épreuves de natation des JO. Les délais semblent serrés mais tenables pour revenir à ce niveau de débit d’ici cinq jours. Cette règle ne s’applique pas au cas d’Anne Hidalgo, nous précise la préfecture de région, qui ajoute «une baignade doit être sécurisée et tout sera fait en ce sens». Le fleuve est actuellement considéré comme «dangereux» pour le grand public par la préfecture, qui souligne le caractère «exceptionnel» de la situation. En temps normal, la Seine a un débit d’environ 150m3 /s l’été, ce qui n’aurait posé «aucun problème» théorique pour y nager. Mais il n’existe pas de seuil défini dans la réglementation permettant de dire à partir de quel débit la Seine serait baignable ou non. Pour pouvoir s’aventurer dans l’eau, Anne Hidalgo devra obtenir un arrêté d’autorisation signé par Marc Guillaume, qui appréciera à ce moment-là le risque encouru. La ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra, lui a cependant grillé la politesse ce samedi 13 juillet au matin en piquant une tête dans le fleuve. Malgré le débit élevé, la préfecture du région confirme à Libération qu’elle a bien autorisé une baignade «encadrée» et fait remarquer que la ministre est «une ancienne sportive de haut niveau».
«Anne Hidalgo se baignera dans la Seine la semaine prochaine, c’est certain», a assuré vendredi matin au micro de RFI Pierre Rabadan, adjoint à la maire de Paris en charge du Sport, des jeux Olympiques et Paralympiques et de la Seine. À moins que depuis sa prise de parole, les pluies aient fait déborder les réservoirs d’eaux usées et que le taux de bactéries E. coli rende l’eau impropre à la baignade, comme cela avait justement été le cas le mois dernier. La mairie de Paris n’a pas encore répondu sur ce point à Libération.
«Pas d’inquiétude»
L’accumulation de jours maussades depuis le début de l’année explique que débit de la Seine se maintienne à un niveau anormalement haut pour la saison. Cela a causé plusieurs reports de préparatifs pour les JO, notamment la répétition générale de la cérémonie d’ouverture, planifiée le 24 juin. La période estivale avait laissé espérer un retour à la normale à la faveur du beau temps. Mais celui-ci peine à s’installer dans la capitale. Malgré tout, les organisateurs s’affichent confiants pour la cérémonie d’ouverture, dans deux semaines, et les épreuves de natation à suivre.
Au sujet de la qualité de l’eau, «80 % des analyses» étaient «conformes aux seuils de la directive européenne» entre le 3 et le 9 juillet, annonce le dernier bulletin publié vendredi par la mairie de Paris. «Je ne vous dis pas qu’on est très sereins vu la météo, mais on n’a pas d’inquiétude sur la capacité à tenir les compétitions à date», a ajouté Pierre Rabadan sur RFI. Concernant la cérémonie d’ouverture, le 26 juillet, le préfet Marc Guillaume a indiqué mardi qu’une «une demi-douzaine» de bateaux, sur la centaine qui défilera, devra être remplacée par des modèles plus petits, si le débit de la Seine reste à des niveaux très élevés. Car il fait monter le niveau de l’eau et empêche les navires les plus imposants de passer sous certains ponts. Une nouvelle répétition a été annoncée pour le mardi 16 juillet.
Mis à jour le 13 juillet à 16h avec les précisions sur la baignade de la ministre des Sports