Pour des raisons nationales comme internationales, l’Allemagne semble très loin d’en avoir fini avec le charbon. De quoi expliquer l’évacuation du village de Lützerath entamée le 10 janvier pour élargir une mine de Garzweiler II de lignite, un charbon de mauvaise qualité qui est «la plus grande source de CO2 en Europe», déplorait auprès de Libération l’experte Catharina Rieve. La quasi-totalité de la forêt de Hambach a déjà été détruite pour faire place à la mine.
Si le pays entend sortir du charbon à l’horizon 2030, ce minéral représente encore un tiers de la production d’électricité et cette source d’énergie a nettement progressé ces deux dernières années outre-Rhin, d’après les données de l’organisation Ember-climate.
Jusqu’en 2020, l’Allemagne était parvenue à faire baisser sa production d’électricité à partir de charbon, avant d’atteindre un creux historique causé en grande partie par la pandémie de Covid-19. Après un retour à la normale en 2021, la guerre en Ukraine a remis le charbon au goût du jour, avec la fermeture des robinets de gaz par la Russie en rétorsion au soutien de Kyiv par les Occidentaux. Troisième cause : la fermeture de trois centrales nucléaires fin 2021, augmentant de facto le besoin d’énergie fossile.
Pour produire leur électricité, la France et le Royaume-Uni ont, par rapport à l’Allemagne, très faiblement recours au charbon. La France depuis les années 1980, du fait de sa production nucléaire. Au Royaume-Uni, depuis moins de dix ans, c’est l’éolien et l’utilisation du gaz naturel provenant de la mer du Nord et de Norvège qui ont pris le relais.
Quand on observe, cette fois, la production d’électricité à partir de toutes les énergies fossiles – charbon, gaz et pétrole –, la différence entre le Royaume-Uni et l’Allemagne est moins visible. Les Britanniques sont à peine plus vertueux.
L’Allemagne enregistre cependant en décembre 2022 un pic de part d’utilisation d’énergie fossile dans sa production d’électricité, son plus haut niveau mensuel depuis presque cinq ans (février 2018). Et son bouquet énergétique est nettement plus carboné que celui des Britanniques, en raison de l’utilisation massive de la lignite et du charbon.
Analyse
Concernant l’objectif allemand d’en finir avec le charbon en 2030, le défi semble particulièrement compliqué, d’autant plus qu’à la différence des Britanniques, ils devraient arrêter leurs dernières centrales nucléaires en 2023, ce qui implique de nouvelles capacités de production à déployer.
Le charbon est un des grands contributeurs au réchauffement climatique. Sa combustion est responsable d’un quart des émissions de CO2 dans l’atmosphère. Selon une étude menée par l’ONG Sandbag, les émissions des centrales à charbon allemandes causent la mort prématurée de 4 200 personnes chaque année. Et l’exploitation du lignite outre-Rhin depuis les années 1970 est responsable de la destruction de dizaines de milliers d’hectares de forêt, de la démolition de 300 villages et du déplacement de 100 000 personnes.