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Environnement

L’érosion côtière menace 500 communes françaises, des milliers d’habitations pourraient disparaître

Le ministère de la Transition écologique a dévoilé ce vendredi 5 avril plusieurs cartes prospectives des zones concernées par le repli du trait de côte, notamment sous l’effet de la hausse du niveau de la mer et du réchauffement climatique.
publié le 5 avril 2024 à 12h05

«L’équivalent d’un terrain de football disparaît chaque semaine dans notre pays sous l’effet de la progression des océans». Après l’alerte lancée par le ministre de la Transition Ecologique Christophe Béchu jeudi soir, un rapport publié ce vendredi 5 avril détaille l’impact à venir du repli du trait de côte grignoté par l’érosion.

Accentué par les phénomènes naturels (houle, vent), la hausse du niveau de la mer et les interventions humaines, le visage du littoral français va nettement changer dans les prochaines années, pointent dans leur étude les experts du Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema). Entre un millier de bâtiments en 2028 et plusieurs centaines de milliers d’ici à 2100 seront potentiellement affectés par l’érosion côtière en France.

Quelque 500 communes à risques ont d’ores et déjà été identifiées et le gouvernement travaille avec les maires pour mettre en place des «plans sur mesure», a aussi précisé Christophe Béchu sur le plateau de TF1. Indemnisation, relogement à l’arrière de la commune sur d’autres terrains : «ce sont des solutions qui sont aujourd’hui sur la table», a-t-il souligné en conseillant aux habitants concernés d’aller voir leur maire. Et le ministre de préciser que «les documents d’urbanisme» allaient être «révisés» sur la base de ces nouvelles cartes des territoires menacés.

Dans le cadre de publication de ces nouvelles données, les experts du Cerema ont analysé trois différents scénarios à plusieurs échéances. Des projections ont été réalisées à l’horizon 2028, 2050 et 2100, en s’appuyant notamment sur des photos aériennes et des données satellites. En 2028, 1 046 bâtiments à risque non protégés par un ouvrage de protection, de type digue ou mur, pourraient être grignotés par la mer. Le tout pour une valeur sur le marché immobilier «d’environ 240 millions d’euros». Plus de la moitié de ces bâtiments concernés sont à usage résidentiel. «A 2028, la position du trait de côte dépendra souvent plus de l’effet de tempêtes […] que de la tendance du recul chronique», précisent les auteurs.

A l’échéance 2050, selon un second scénario considéré comme «réaliste», 5 208 logements seraient concernés par le recul du trait de côte, dont près de 2 000 résidences secondaires et 1 246 résidences principales. Soit une valeur totale de 1,2 milliard d’euros. «Trois composantes sont prises en compte [dans ce scénario] : le recul chronique du trait de côte, le recul événementiel (quand une tempête va venir grignoter 10 à 20 mètres de littoral, ou qu’une falaise s’écroule) et le maintien en «service» de tous les ouvrages de protection», explique au Figaro François Hédou, directeur du projet au Cerema.

L’étude identifie également 1 437 locaux d’activité potentiellement touchés à cette échéance. La Guadeloupe, la Corse, la Manche, la Vendée, et une large partie du bassin méditerranéen font partie des zones en première ligne.

D’ici à 2100, 450 000 logements potentiellement concernés par l’érosion

«Le scénario pour 2100 présente quant à lui une perspective nettement différente, basée sur des hypothèses très défavorables», notent les experts du Cerema. Les orientations générales qui guident ce scénario sont la disparition complète des structures de défense côtière et l’inondation progressive de toutes les zones topographiquement basses du littoral, détaille l’étude. A cet horizon à long terme, 450 000 logements seraient potentiellement concernés par l’érosion côtière, un phénomène amplifié par l’élévation du niveau des mers et la multiplication des événements extrêmes dus au réchauffement climatique. Dans son précédent rapport publié en 2018, le Cerema prévoyait, au pire, 50 000 logements menacés. Un chiffre ainsi largement revu à la hausse.

Plus de 50 000 locaux d’activité pourraient également être touchés dans ce scénario du pire, 1 765 kilomètres de «routes structurantes» et 243 kilomètres de voies ferrées. Le rapport chiffre ces conséquences en chaîne à 86 milliards d’euros. Cette projection illustre «les possibles conséquences de l’inaction face aux effets du changement climatique. Dans ce scénario, le nombre très élevé d’enjeux identifiés invite à une réflexion globale à l’échelle de grands territoires», alerte le Cerema, «tant du point de vue économique que de notre capacité à vivre sur les territoires littoraux».