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Les eurodéputés recalent un texte clé de réforme du marché carbone, jugé pas assez ambitieux

Pilier du plan climat de l’UE, le texte, qui prévoit notamment la suppression des quotas gratuits aux industriels en échange d’une taxe carbone aux frontières, a été rejeté à la surprise générale, après avoir été remanié. Une mouture révisée sera soumise à un vote ultérieur.
Le 9 mai à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine). Le texte du Green Deal du Parlement européen comportait notamment l'interdiction de la vente d'automobiles à moteur thermique d'ici 2035. (Xose Bouzas/Hans Lucas. AFP)
publié le 8 juin 2022 à 17h17

Les eurodéputés ont rejeté ce mercredi en séance plénière un texte clé sur la réforme du marché européen du carbone, jugé pas assez ambitieux par les verts et la gauche. Ce rejet va entraîner une renégociation complète de ce pilier du plan climat de l’Union européenne en commission parlementaire.

Le texte, qui prévoit l’élargissement du marché d’échange des quotas d’émissions de CO2, mais aussi la suppression des quotas gratuits aux industriels européens en échange d’une taxe carbone aux frontières de l’UE, a été rejeté à la surprise générale par 340 voix contre (265 pour, 34 abstentions).

Le Parlement européen devait se prononcer ce mercredi sur huit des quatorze textes de la feuille de route proposée en juillet 2021 par la Commission européenne pour réduire de 55 % d’ici à 2030, par rapport à 1990, les émissions de gaz à effet de serre de l’UE.

«Coup de tonnerre ! La majorité doit revoir sa copie […] en raison de règles pas assez ambitieuses. Le climat n’attend pas», a commenté l’eurodéputée Karima Delli (Verts). «Quel jour terrible. C’est une honte de voir l’extrême droite voter avec les socialistes et les verts», a rétorqué Peter Liese (Parti populaire européen), rapporteur du texte rejeté, dans une ambiance très électrique au sein de l’hémicycle du Parlement européen à Strasbourg. Une large majorité des eurodéputés ont approuvé que le texte soit révisé en commission parlementaire, puis que la mouture révisée soit proposée à un vote ultérieur. «Grâce à une coalition avec les verts et les socialistes, nous avons obtenu le renvoi en Commission du texte pour refuser ce recul climaticide inacceptable», a déclaré l’eurodéputée de La France insoumise Manon Aubry.

Amendement pour des quotas gratuits au nom de la compétitivité des entreprises

La proposition législative soumise aux eurodéputés sur le marché carbone traduisait un compromis passé entre le PPE (droite pro-européenne, premier groupe du Parlement) et Renew (centristes et libéraux). Il prévoyait notamment une réduction de 63 % d’ici à 2030 (par rapport à 2005) des émissions des secteurs soumis au marché carbone européen : mieux que l’objectif proposé par la Commission (-61 %), mais en net recul par rapport au vote en commission parlementaire environnement (-67 %). Il ajustait également le calendrier pour éliminer les quotas d’émissions gratuits accordés aux industriels européens, à mesure que seront taxées les importations dans l’UE de secteurs polluants, sur base du prix du CO2 européen.

Un amendement du texte, poussé par le PPE et adopté mercredi, exigeait un maintien jusqu’en 2034 de ces quotas gratuits dans l’UE, au nom de la compétitivité des entreprises… ce qui repoussait également à 2034 la mise en place complète de la taxe carbone aux frontières. Précédemment, la commission environnement avait voté pour que cet «ajustement aux frontières» s’applique en totalité dès 2030 (cinq ans plus tôt que ce que proposait la Commission) et que les quotas gratuits soient supprimés dès cette date.

Le texte final incluant ces arbitrages a provoqué une vive opposition des verts, des sociaux-démocrates (S & D), de la gauche radicale, ainsi que de l’extrême droite de l’hémicycle.