
Reportage
«Les habitants ont échappé à la mort» : en Suisse, Blatten, un «paradis englouti» après la chute d’un glacier
Les deux cousins ont garé leur voiture sur le bas-côté de la route alpestre, au milieu des conifères, des fleurs violettes et des herbes hautes, avant de descendre quelques mètres à pieds pour s’offrir une vue dégagée. L’un tient une paire de jumelles dans les mains, l’autre regarde à travers une longue-vue fixée sur un trépied. Ils ne s’échangent aucun mot. Devant eux, le paysage n’est qu’une ruine. Deux kilomètres carrés de boue tapissent la vallée du Lötschental. Les septuagénaires se trouvent en Suisse alémanique, dans le canton sinistré du Valais. Autrefois, ici, se dressait le clocher du village de Blatten. C’était il y a une semaine, une autre vie. «Mon cousin y habitait depuis tout jeune, souffle l’homme aux jumelles. Il ne parle presque pas. C’est trop dur pour lui. Je crois qu’il a besoin de faire le deuil d’une existence.»
Depuis plus d’une semaine, les 340 habitants de Blatten affrontent l’impensable. Mercredi 28 mai, au milieu de l’après-midi, le petit glacier du Birch (dit Birchgletscher), 500 mètres de long, s’est décroché des cimes comme le ciel tomberait sur la tête. Il a dévalé la pente dans la poussière et le fracas, emportant tout sur son passage, les sapins, les roches, la terre. En à peine une minute, la quasi-totalité de la commune a été engloutie. Quant aux dernières maisons épargnées, elles ont disparu sous les eaux dès le lendemain. Noyées dans un lac artificiel formé par la rivière de la Lonza retenue par les gravats. Blatten n’