Des portes fermées, des dénigrements, des amis perdus. Voici comme elle résume presque quinze ans de militantisme contre les pesticides dans la viticulture Bordelaise. Après une demi-heure à réciter son parcours sur un ton monocorde, assise voûtée sur une chaise dans son salon encombré, Marie-Lys Bibeyran souffle, enfin, sa lassitude. «Pour la première fois de ma vie depuis 2011, je pense que j’aurais mieux fait de la fermer, lâche-t-elle les yeux dans le vague. Et pourtant je n’avais jamais regretté. Même quand j’étais en plein dedans, que c’était très dur, jamais.» Pourquoi maintenant ? Un haussement d’épaules. «Je me dis, tout ça pour ça, quoi.»
Quelques mois plus tôt, Marie-Lys Bibeyran a publié un livre, On vous le dira dans vingt ans. Pesticides, vin et bouche cousue, sorti le 12 avril 2024 aux éditions BBD. Le sous-titre est explicite. Le titre plus personnel : c’est la réponse du cancérologue à son frère, quand il lui a demandé si sa maladie était liée à son travail, vigneron tractoriste. Elle n’a jamais digéré ce cynisme. Denis Bibeyran n’avait pas vingt ans devant lui, mais dix mois d’expérience de vie à son diagnostic. Il est décédé d’un cancer des voies biliaires en 2009, à 46 ans, dont 24 à bo