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Alexandre Cheval, garde-pêche à la fédération de pêche du Doubs, près d'un cadavre de poisson au fond de l'eau. A Ornans, le 30 avril 2025.Alexandre Cheval, garde-pêche à la fédération de pêche du Doubs, près d'un cadavre de poisson au fond de l'eau. A Ornans, le 30 avril 2025. (Raphaël Helle/Signatures)

Reportage

«On est passés de l’une des plus belles rivières d’Europe à un cimetière de poissons» : dans le Doubs, le décollage du comté asphyxie les cours d’eau

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La rivière de la vallée d’Ornans, dans le Doubs, voit pulluler algues vertes et poissons morts par vagues récurrentes depuis 2010. L’intensification de la production agricole, dédiée majoritairement à la filière comté, est pointée du doigt.
publié le 3 mai 2025 à 17h43

En cette fin avril, la ville comtoise d’Ornans, dans le Doubs, se montre sous son meilleur jour. Les touristes se pressent sur les ponts qui traversent la rivière de la Loue. Les façades des nombreuses maisons sur pilotis, surplombées par des falaises en calcaire, se reflètent dans le cours d’eau. Mais quelques minutes de marche le long de la rivière suffisent à briser ce cadre idyllique. Alexandre Cheval, garde-pêche à la fédération de pêche du département, pointe du doigt une tache blanche au fond de l’eau. Un cadavre de poisson, une truite fario, gît sur un caillou vaseux. Plus loin, c‘est un ombre commun, autre espèce de salmonidé, qui s’est échoué près du bord.

«Dans un sens, on pourrait presque s’estimer heureux de voir des poissons morts, parce que ça veut dire qu’il y en a encore un peu», lance le quadragénaire, bottes en caoutchouc aux pieds. Depuis la fenêtre de sa maison qui borde la Loue, une riveraine, «ici depuis cinquante ans» et «aux premières loges de ce carnage», l’interpelle. «C‘est souvent qu’il y a des tas de poissons morts comme ça. Ça peut être sept ou huit, juste là, déplore la retraitée. Et regardez toutes ces algues au fond, il y en a de plus en plus.»

«On devrait voir le fond et tous les cailloux blancs», acquiesce Alexandre Cheval. Or le lit de la Loue est ici recouvert d’un épais tapis d’algues vertes filamenteuses. Celles-ci «colmatent le fond» et «recouvrent le moindre endroit où les pois

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