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Filets

Cimetière de poissons dans le golfe de Gascogne: plusieurs enquêtes lancées pour comprendre ce qui s’est passé

Selon l’ONG Sea Sheperd, l’un des quatre navires usines présents au large de La Rochelle serait à l’origine du rejet de plusieurs tonnes de merlans bleus. Le ministère de la Mer et la Commission européenne ont annoncé l’ouverture d’une enquête.
Une partie des 100 000 merlans bleus rejetés dans l'Atlantique. (Sea Shepherd/ABACA)
publié le 4 février 2022 à 15h38

A première vue, on pourrait penser qu’il s’agit d’une nappe de fuel qui s’étend au large du golfe de Gascogne. En y regardant de plus près, ce sont en vérité des milliers de poissons morts qui gisent à la surface de l’eau. Une découverte réalisée jeudi 3 février par l’ONG Sea Shepherd, qui évoque ce qui pourrait être un accident de pêche. Une marchandise qui n’avait pas vocation à être pêchée, jetée par-dessus bord.

Il n’a pas fallu attendre bien longtemps pour que les autorités réagissent. «J’ai demandé une enquête administrative», a ainsi déclaré la ministre de la Mer, Annick Girardin, ce vendredi devant la presse lors d’une visite à Saint-Jean-de-Luz (Pyrénées-Atlantiques). Elle y rencontrait des professionnels de la filière pêche. Selon l’ONG fondée par Paul Watson, qui a diffusé sur les réseaux sociaux des photographies de poissons morts flottant à la surface de l’océan Atlantique ainsi qu’une impressionnante vidéo, «plus de 100 000 poissons ont été rejetés à la mer» à 300 km de La Rochelle.

D’après Sea Shepherd, le sinistre viendrait du Margiris, l’un des plus gros navires de pêche au monde, long de 143 m et battant pavillon lituanien. Ce bateau, géré par une société néerlandaise, est même «banni en Australie» depuis la mobilisation de pêcheurs et d’habitants contre sa venue dans les eaux nationales. Le Margiris, c’est un filet long de 600 mètres. Un bateau capable de contenir jusqu’à 6 000 tonnes de poissons. D’après la ministre, «le navire s’est identifié de lui-même en bout de course. L’armateur a reconnu un accident à bord, c’est un filet qui a lâché», a-t-elle ajouté.

«Une espèce soumise à des quotas»

«Aujourd’hui, à 05 h 50 GMT, un navire membre de la PFA, le Margiris, a signalé […] un incident de pêche au large de La Rochelle», tweetait dès jeudi soir l’association européenne des chalutiers congélateurs pélagiques (PFA). «Fait rarissime, le chalut contenant des merlans bleus, une espèce soumise à quotas, s’est brisé accidentellement, relâchant ainsi de manière involontaire des poissons en mer», ajoutait la PFA. Les merlans bleus sont habituellement destinés à fabriquer des surimis.

«Les poissons morts seront retirés des quotas du bateau», assure Annick Girardin. «La France défend une pêche durable et cela n’en est pas le reflet. Si une infraction devait être avérée, des sanctions seraient prises vis-à-vis de l’armateur responsable, qui sera identifié», a précisé dans un tweet la ministre de la mer.

Une catastrophe qui illustre malheureusement à merveille la campagne de sensibilisation hivernale de l’ONG Sea Shepherd, qui milite depuis des années pour interdire la pêche en hiver dans le golfe de Gascogne et protéger les dauphins. Côté Commission européenne, on s’est également saisi du sujet. Le commissaire chargé de l’Environnement, le Lituanien Virginijus Sinkevicius, a annoncé sur Twitter qu’une «enquête» était lancée «auprès des autorités nationales de la zone de pêche (la France) et de l’Etat présumé du pavillon du navire (non connu à ce stade, puisqu’il n’y a pas de certitude sur le bateau), afin d’obtenir des informations et des preuves exhaustives sur l’affaire».