Sur la table, une bouteille de liquide brun verdâtre, à l’odeur proche de celle de l’humus. Il s’agit d’urine humaine concentrée. A côté, des paquets de biscuits dont le blé a été nourri au pipi suscitent des moues. Christelle, la trentaine, feuillette un bouquin pour apprendre à jardiner avec de l’«or liquide» et se dit «curieuse d’apprendre». Ce soir-là, une vingtaine de futurs habitants de l’écoquartier Saint-Vincent-de-Paul, dans le XIVe arrondissement de Paris, arrivent au compte-goutte dans l’ancien hôpital réhabilité où ils habiteront en 2026. Ils ont été conviés pour discuter d’une curieuse innovation : leurs logements comporteront des toilettes capables de récupérer l’urine pour en faire de l’engrais local. La ville a confié ce projet à Paris & Métropole Aménagement. «Nous voulons associer les habitants et qu’ils comprennent ce qu’implique la collecte de l’urine», explique Julie Ginesty, responsable ville durable de cette entreprise publique.
De quoi produire 2,5 baguettes de pain par jour
L’auditoire prend place. «D’où vient cette idée saugrenue ?» débute Louise Raguet. Assistante à la maîtrise d’ouvrage pour Paris & Métropole Aménagement, elle rembobine : les plantes absorbent les nutriments (azote, phosphore, potassium) naturellement présents dans les sols, qui se retrouvent dans les légumes, dans notre corps et sortent via nos urines avant de partir à l’égout.