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Haut-Rhin : le gouvernement acte le confinement de 42 000 tonnes de déchets toxiques à Stocamine

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Le ministre de la Transition écologique a confirmé mardi 19 septembre l’enfouissement de produits chimiques sous une chape de béton. Des élus demandent une enquête parlementaire et une association de défense de l’environnement a porté plainte.
Des employés dans une galerie minière de Stocamine à Wittelsheim, le 13 juillet 2021. (Sébastien Bozon/AFP)
publié le 20 septembre 2023 à 10h25

Des décennies de lutte balayées. Le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, a annoncé mardi 19 septembre lancer sans délai les travaux de confinement de 42 000 tonnes de déchets toxiques enfouis à 500 mètres sous terre à Stocamine, cette ancienne mine de potasse dans le Haut-Rhin.

Devant des élus du Haut-Rhin, le ministre a soutenu que le confinement définitif de ces déchets toxiques (arsenic, mercure, amiante…) sous une chape de béton constituait la «seule solution permettant de s’assurer que les déchets ne pourront pas contaminer la nappe» phréatique d’Alsace qui alimente en eau potable près de 8 millions de personnes. «Il s’agit d’une décision qui s’impose à tous afin de ne pas compromettre la santé des générations futures», a affirmé Béchu.

Un arrêté préfectoral d’autorisation du confinement des déchets, qui marquera le véritable feu vert au démarrage du chantier, sera «signé avant la fin du mois de septembre», selon le ministère, qui souligne que Christophe Béchu se rendra «dans les prochaines semaines» sur le site de Stocamine. Il détaillera les mesures compensatoires à cette décision, notamment des opérations de surveillance et de réparation environnementale. Et les travaux de confinement «doivent impérativement être terminés dès 2027», a souligné le ministère.

Opposition farouche au projet

Le ministre avait mené ces derniers mois une réflexion sur un éventuel retrait de certains déchets entreposés dans cette ancienne mine, comme le réclamaient des élus du territoire, avant d’y renoncer officiellement mardi. Christophe Béchu s’est donc rangé à l’avis de sa prédécesseuse, Barbara Pompili, qui considérait que le déstockage des déchets était une opération plus risquée – tant pour les personnels que pour l’environnement – que l’enfouissement définitif.

Des habitants et des élus locaux sont farouchement opposés au projet. Plusieurs études ont montré que le confinement des déchets sous le béton n’empêcherait pas la contamination du réservoir d’eau souterrain, dans des proportions certes minimes, mais dans un délai qui varie selon les scénarios de quelques décennies à plusieurs siècles.

En réaction à l’annonce de Christophe Béchu, les députés LFI-Nupes ont demandé l’ouverture d’une commission d’enquête parlementaire sur «l’attentisme des pouvoirs publics» qui aurait contraint à «l’enfouissement définitif des déchets» et empêché d’envisager sérieusement leur sortie de la mine, selon le député Insoumis du Bas-Rhin Emmanuel Fernandes. Ce dernier dénonce un écocide et souhaite que les travaux de confinement des déchets déjà entreposés ne débutent pas à Stocamine «dans l’attente des résultats et des conclusions» de cette commission d’enquête parlementaire.

«Conséquences juridiques essentielles»

Lundi, à la veille de cette annonce, l’association écologiste Alsace Nature avait porté plainte contre la société Mines de potasse d’Alsace (MDPA) pour «faux», «escroquerie» et défaut de maintenance du site de stockage des déchets toxiques. Dans la plainte, adressée au parquet de Strasbourg, Alsace Nature reproche aux MDPA d’avoir faussement présenté, au cours de l’enquête publique, l’année 2027 comme une date butoir à partir de laquelle aucuns travaux ne seraient réalisables dans la mine, qui se referme lentement sur elle-même. Elle estime que cette date «a des conséquences juridiques essentielles» puisqu’elle permet d’exclure un projet de déstockage au-delà de 2027.

L’association estime également que la société Mines de Potasse d’Alsace a «omis de préciser que l’affaissement des toits de galeries (ou) la fragilité des piliers» sont dus au «défaut d’entretien» de la mine depuis 2017. Pour l’association, «seule la maintenance en vue des opérations de confinement a été réalisée, mais non celle en vue d’assurer la réversibilité des déchets, comme l’impose pourtant la législation». Le «défaut d’entretien» aurait «gravement porté atteinte à la sécurité du personnel en charge du déstockage».

Enfin, Alsace Nature reproche aux MDPA des «manœuvres frauduleuses», pour avoir défendu le projet de confinement en s’appuyant sur différentes expertises, alors que celles-ci «ne concluent nullement dans le sens d’une impossibilité de déstocker». En complément de sa plainte, le collectif anticipe le chantier à venir en demandant la saisine du juge des libertés et de la détention «aux fins de suspendre les travaux» et «constater le défaut de maintenance des galeries depuis 2017».